Revue Prescrire, article en une, Europe et médicament septembre 2003 (10)
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Des amendements importants votés par le Parlement n'ont pas été repris par le Conseil européen des ministres de la santé.


Le Collectif Europe et Médicament a listé ci-dessous les points à réexaminer, proposant pour chacun un ou plusieurs amendements accompagnés d'une justification.

Passage obligatoire par la procédure d'AMM centralisée pour les nouvelles substances, et pour les médicaments appartenant à des classes qui ont donné lieu à des mesures de pharmacovigilance (Annexe I du Règlement ; il n'y avait pas eu d'amendement voté sur ce point, mais la proposition initiale de la Commission et le rapport du rapporteur Madame Grossetête était en faveur de la procédure centralisée pour toutes les nouvelles substances).

Nouvelle proposition d'amendement - Annexe I point 4 du Règlement (nouveau) : "Tout médicament à usage humain qui contient une nouvelle substance, ou une substance appartenant à une classe pharmacologique ayant fait l'objet de mesures de pharmacovigilance, ou d'une ré-évaluation de sa balance bénéfices-risques par l'Agence européenne du médicament, ou par une Agence d'un pays de l'Union ou d'un pays tiers".

Justification : par exemple, les effets indésirables musculaires provoqués par les statines, les effets indésirables cardiaques des anti-COX 2 ou des antihistaminiques H1, les divers effets indésirables des neuroleptiques et des antidépresseurs, qui ont donné lieu à de multiples mesures de pharmacovigilance, devraient conduire à autoriser les nouveaux médicaments de ces classes seulement après passage par la procédure centralisée. Pour toutes ces classes médicamenteuses sensibles, comme pour les substances nouvelles et nécessairement encore mal connues, réunir l'expertise de l'ensemble des États membres, dans une procédure centralisée, plus transparente qu'au niveau de chacun des États, devrait apporter in fine plus de garanties aux patients.

Obligation pour les agences, européenne et nationales, de prendre en compte les données de pharmacovigilance émanant de pays tiers et de l'Organisation Mondiale de la Santé (amendement 172 - considérant 15 de la Directive, mais il reste à insérer un amendement correspondant).

Nouvelle proposition d'amendement - article 25b du Règlement (nouveau) :
"Dans son analyse des données de pharmacovigilance, l'Agence doit prendre en compte les données présentes dans la base de données de pharmacovigilance de l'Organisation mondiale de la santé et dans celles des pays tiers".

Nouvelle proposition d'amendement - article 102 alinéa 4 de la Directive (nouveau) : "Ce système tient compte également des informations présentes dans la base de données de pharmacovigilance de l'Organisation mondiale de la santé et dans celles des pays tiers".

Justification :
le marché du médicament est aujourd'hui mondial, et il serait scientifiquement inconcevable de ne pas mettre en commun les connaissances de l'ensemble des pays en matière d'évaluation, en particulier dans le domaine de la pharmacovigilance. La base de données de l'Agence européenne sur les effets indésirables des médicaments, bien qu'invisible à ce jour, est semble-t-il déjà consistante. Mais la prise en compte d'autres données rassemblées par les autres pays ou organismes actifs en matière de pharmacovigilance, notamment au sein du centre collaborateur de l'OMS pour les effets indésirables, peut faire avancer plus vite la connaissance des risques liés aux médicaments, et donc la gestion et la prévention de ces risques.

Incitation des patients à la notification spontanée des effets indésirables, en leur signalant le caractère nouveau et encore mal connu du médicament (amendements 42 - article 13-3 bis du Règlement - et 81 - article 59-1-d-bis de la Directive - votés par le Parlement et non repris par le Conseil).

Nouvelle proposition d'amendements - articles 13-3 bis du Règlement et 59-1-d bis de la Directive (nouveau) : "(…) pour tout nouveau médicament, durant les cinq premières années suivant sa mise sur le marché, la notice doit comporter la mention "médicament nouvellement autorisé - merci de contribuer à une meilleure connaissance de ce médicament en signalant ses effets indésirables éventuels"".

Justification : la récente expérience de recueil par la chaîne de la BBC (émission Panorama) du discours des patients souffrant d'effets indésirables dus aux antidépresseurs inhibiteurs de la recapture de la sérotonine, et la comparaison de ce discours avec les notifications de ces mêmes effets par les médecins, suffit à montrer l'utilité qu'il y a à entendre les patients. Cette expérience a d'ailleurs amené l'agence britannique du médicament à réévaluer la paroxétine. La notification spontanée des effets indésirables par les patients ne suffit pas à imputer un effet à un médicament, pas plus que la seule notification par les professionnels de santé. C'est l'ensemble de ces moyens, ajouté aux enquêtes prospectives de pharmacovigilance, qui permet de faire progresser la connaissance et le bon usage du médicament. La nécessaire complémentarité des moyens en pharmacovigilance a été maintes fois rappelée par l'Organisation mondiale de la santé.

Possibilité pour les patients de notifier directement auprès des autorités quand ils n'ont pas d'autre recours (amendement 54 - article 20-3 du Règlement voté par le Parlement, et article 101 de la Directive).

Nouvelle proposition d'amendement - article 20-3 du Règlement (complète) :
"(…) Les patients sont encouragés à signaler les éventuels effets indésirables apparus lors de l'utilisation d'un médicament, soit à un médecin, un pharmacien ou une infirmière, soit, en cas de besoin, directement aux autorités compétentes chargées de la pharmacovigilance au moyen d'un formulaire mis à disposition dans les pharmacies".

Nouvelle proposition d'amendement - article101 de la Directive (complète) : "Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour encourager les patients à signaler les éventuels effets indésirables apparus lors de l'utilisation d'un médicament, soit à un médecin, un pharmacien ou une infirmière, soit, en cas de besoin, directement aux autorités compétentes chargées de la pharmacovigilance au moyen d'un formulaire mis à disposition dans les pharmacies".

Justification : l'expérience a montré dans tous les pays qui ont un système de pharmacovigilance que seule une partie des professionnels de santé participe régulièrement au système de recueil des effets indésirables. Si le médecin et le pharmacien d'un patient négligent d'envoyer une déclaration d'effets indésirables, ou en cas de relation dégradée entre un patient et ses praticiens habituels, ou de divergence d'appréciation d'un effet indésirable, il faut donner au patient isolé les moyens de signaler cet effet malgré tout.

Obligation d'intégrer dans la banque de données publique de l'Agence européenne toutes les données de pharmacovigilance (amendement 157 - article 51-2 du Règlement - voté par le Parlement et non repris par le Conseil).

Nouvelle proposition d'amendement - article 51-2 du Règlement (complète) : "(…) La banque de données prévue au paragraphe 1 point j) est conçue pour permettre d'accéder, pour chacun des médicaments commercialisés dans l'Union, au résumé des caractéristiques du produit, à la notice, aux informations reproduites sur l'étiquetage, et aux informations de pharmacovigilance qu'il est prévu de rendre accessibles selon le paragraphe 1 point d)".

Justification : les médicaments ont à la fois des effets bénéfiques et des effets indésirables. Pour parvenir à une utilisation optimale des médicaments, les patients doivent pouvoir accéder à l'ensemble des informations, qu'elles concernent les bénéfices ou les risques, et à pouvoir ainsi connaître l'état de la balance bénéfices/risques d'un médicament. Maintenir l'opacité sur les informations concernant les effets indésirables des médicaments, ou rendre leur accès difficile réduit la confiance des patients dans les médicaments, les agences du médicament et les firmes pharmaceutiques. En outre, sans mise en balance des bénéfices et des effets indésirables, il n'y a pas de prise en compte sereine et de prévention de ses effets. Cela conduit à des situations de crise, de panique, des arrêts de traitement brutaux inopportuns le jour où une agence se décide d'un seul coup à annoncer un effet indésirable, à prendre une mesure de restriction d'usage ou de retrait du médicament.

©Collectif Europe et Médicament 1er septembre 2003