Madame, Monsieur la(le) député(e),
Le
Collectif Europe et Médicament accueille favorablement la proposition visant
à mettre des médicaments adaptés à la disposition
des enfants et de ceux qui les soignent. Le Collectif estime cependant que cette
proposition doit être sérieusement amendée pour que le règlement
relatif aux médicaments pédiatriques réponde réellement
aux besoins des enfants. Pourquoi
une telle précipitation ? Une discussion approfondie sur
la proposition de règlement relatif aux médicaments pédiatriques
est inévitable, même si la Commission Environnement et Santé
est actuellement occupée par l'examen d'autres textes très importants.
Or le Collectif Europe et Médicament constate que vous ne disposerez que
de quelques jours pour déposer des amendements après la discussion
en Commission. Ce délai nous semble peu compatible avec l'amélioration
nécessaire de cette proposition de règlement. Mieux
que rien ? Certains députés pourraient être
tentés de considérer que cette proposition de règlement ne
nécessite pas beaucoup d'implication de leur part, parce que le règlement
serait "mieux que rien". Mais en réalité, il est faux
de dire qu'il n'y a "rien" aujourd'hui pour les enfants. Il y a au contraire
beaucoup d'expérience accumulée, qu'il faut commencer par capitaliser
pour identifier les besoins réels et les priorités. Le règlement
devrait donc avoir pour ambition non pas : "mieux que rien", mais :
"mieux que ce qui existe déjà ". Faire
mieux, au meilleur coût La proposition de règlement vise
à offrir des incitations supplémentaires (payées par la collectivité)
aux firmes pharmaceutiques pour qu'elles financent davantage d'études réalisées
chez des enfants. Le coût de ces incitations pour la société
(coût humain découlant de la participation d'enfants à des
essais cliniques, coût supplémentaire de fonctionnement de l'Agence
européenne du médicament, et coût financier découlant
des incitations) nécessite des équilibres rigoureux entre intérêts
des firmes et intérêt des enfants. Il convient de ne mettre en place
des incitations au développement de médicaments pédiatriques
que s'ils apportent aux enfants un réel avantage thérapeutique,
dans un cadre particulièrement renforcé de pharmacovigilance. Cet
équilibre ne peut être atteint que par : 1- une définition
et une évaluation rigoureuse des besoins réels des enfants ;
2- la mise en place de moyens adaptés à ces besoins ; 3-
une transparence totale sur le processus ; 4- un recherche active des
données de pharmacovigilance ; 5- la proportionnalité des
récompenses à l'effort des firmes.
Une
escalade des "incitations" aux firmes Si l'on prend un peu
de recul par rapport à la proposition de règlement relatif aux médicaments
pédiatriques, on constate qu'une des motivations affichées de la
Commission européenne est de donner aux firmes pharmaceutiques européennes
les mêmes avantages que les firmes des États-Unis d'Amérique
(où existe déjà une prolongation de monopole de 6 mois pour
encourager les médicaments pédiatriques). Or, dans une période
où la recherche et développement de médicaments est moins
féconde, les firmes multiplient les demandes de prolongation de monopoles,
présentées comme autant d'incitations à se concentrer sur
tel ou tel domaine thérapeutique. Ainsi par exemple, aux États-Unis,
les firmes pharmaceutiques sont en passe d'obtenir, dans le cadre du plan Bioshield
(plan de lutte contre le bio-terrorisme), le droit de prolonger 6 mois leur monopole
sur un médicament de leur choix, si elles développent par exemple
un nouvel antibiotique. Enfants aujourd'hui, antibiotiques demain, femmes ou personnes
âgées plus tard
, jusqu'où les sociétés
pourront-elles accepter de financer spécialement des recherches qui faisaient
hier encore partie du métier normal des firmes pharmaceutiques ? Jusqu'où
accepteront-elles de prolonger le monopole de médicaments par ailleurs
de plus en plus chers ? Le fait que la proposition de règlement
relatif aux médicaments pédiatriques attribue systématiquement
6 mois de monopole supplémentaires pour les médicaments (dans toutes
leurs indications, pour enfants et pour adultes), sans lien ni avec les coûts
de recherche et développement, ni avec l'intérêt thérapeutique
des médicaments destinés aux enfants, est une allocation aveugle
de ressources collectives dans le domaine du médicament.
Prendre
le temps d'améliorer la proposition de règlement La proposition
de règlement relatif aux médicaments pédiatriques présente
de nombreuses opportunités de mieux répondre aux besoins réels
des enfants. Mais pour que ce règlement remplisse pleinement cet objectif,
il doit être amendé de manière significative, au delà
des propositions du rapporteur. Cela demande que vous preniez le temps d'en analyser
les enjeux et que vous ayez le temps de déposer des amendements, le cas
échéant.
Nous sommes sûrs que c'est également
votre avis. Nous comptons sur vous. Bien cordialement ©Collectif
Europe et Médicament 1er mai 2005 europedumedicament@free.fr
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