En 2007, la Commission
française de la transparence a examiné la demande de renouvellement
de l'inscription sur la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables
par la Sécurité sociale de l'association dextropropoxyphène
+ paracétamol (Di-Antalvic° ou autre) (1). Elle a considéré
que cette association d'antalgiques apporte un service médical rendu (SMR)
"important" (à noter que la firme « n'a fourni aucune
nouvelle donnée » et que la Commission s'est basée sur
un texte datant de 2002, de l'Agence nationale pour l'accréditation et
l'évaluation en santé (intégrée depuis dans la Haute
autorité de santé)) ; et elle a rendu un avis favorable au
maintien de son remboursement à 65 %. L'avis
de la Commission repose sur une argumentation bien légère :
« On ne dispose pas d'étude ayant comparé l'effet antalgique
de l'association paracétamol + dextropropoxyphène à celui
du paracétamol seul » ; et se veut rassurant : « Suite
à une décision de retrait de cette association en Suède et
au Royaume-Uni, l'Afssaps a rappelé que l'association paracétamol
+ dextropropoxyphène n'expose pas à un risque de surdosage et donc
d'intoxication grave dans les conditions normales d'utilisation. Aucun risque
pour la santé publique comparable à celui observé au Royaume-Uni
et en Suède n'a été identifié en France »
(1). Ainsi, la Commission
se place très clairement au service des firmes : elle dit manquer
de comparaison dextropropoxyphène + paracétamol versus paracétamol
et conclut à l'intérêt de l'association ! Et elle conclut
comme si ces risques de surdosages n'existaient pas en France ! Le
dextropropoxyphène, un opiacé apparenté à la méthadone,
commercialisé depuis plus de 40 ans en France, expose les patients à
des risques de dépression respiratoire, de perturbation de la conduction
cardiaque, voire de décès, notamment en cas d'insuffisance rénale
et chez les patients âgés (2,3). L'association paracétamol
+ dextropropoxyphène a une balance bénéfices-risques défavorable
sans avantage démontré sur le paracétamol non associé (2).
Malgré ces risques,
cette association d'antalgiques est toujours très prescrite en France.
Selon l'étude Medic'Am de la Caisse nationale d'Assurance maladie (CNAM)
sur les médicaments prescrits aux assurés de ce régime général,
l'association dextropropoxyphène + paracétamol a été
au 2e rang des médicaments les plus prescrits en 2006 avec environ 48 millions
de boîtes prescrites (princeps et copies réunies), derrière
le paracétamol (environ 192 millions de boîtes) (4). L'association
dextropropoxyphène + paracétamol + caféine (Propofan°
ou autre) arrive au 10e rang avec environ 16 millions de boîtes prescrites (4). D'autres
pays (Angleterre, Pays de Galles, Suède et Suisse notamment) ont décidé
de retirer du marché l'association dextropropoxyphène + paracétamol (2).
Les autorités françaises devraient suivre leur exemple : il
n'y a aucune raison d'exposer les patients aux risques liés à une
association qui n'apporte aucun progrès thérapeutique sur les antalgiques
déjà existants, paracétamol et codéine en particulier. ©La
revue Prescrire 15 octobre 2007 Rev Prescrire 2007 ; 27 (287) :
735. _________ Références
1- HAS - Commission de la transparence "Avis-Di-Antalvic gélule"
25 avril 2007 : 2 pages. 2- Prescrire Rédaction "Dextropropoxyphène :
encore des décès" Rev Prescrire 2007 ; 27 (282) :
274. 3- Prescrire Rédaction "L'Agence française des produits
de santé est-elle avant tout au service des patients, ou au service des
firmes pharmaceutiques ?" Rev Prescrire 2005 ; 25 (266) :
793-796. 4- CNAM "Medic'Am 2006". Site www.ameli.fr consulté
le 18 juin 2007. |