Depuis 1991, plus de 100 "cartons rouges du conditionnement" ont été attribués dans le cadre des Palmarès Prescrire. Les motifs étaient divers :
- un danger, notamment pour les enfants, en raison d'un accès trop facile au médicament (absence de bouchon-sécurité sur des flacons-vrac, plaquettes aisément pelables), ou d'un arôme ou d'une forme attractifs ;
- une information incomplète ou source de confusion au niveau des étiquetages ou des notices ;
- l'absence d'un dispositif doseur adapté ;
- la ressemblance des différentes présentations au sein d'une gamme ombrelle, source de confusion entre des compositions très différentes ;
- une présentation qui banalise le médicament ou expose à des surdoses.
En octobre 2013, Prescrire a réexaminé les conditionnements de ces médicaments, afin de repérer d'éventuelles améliorations (a).
Quelques conditionnements mieux sécurisés
Des efforts ont été faits par certaines firmes pour limiter une exposition accidentelle des enfants. C'est le cas de la solution buvable Sectral° 40 mg/ml (acébutolol), dont le flacon est devenu muni d'un bouchon-sécurité (n° 266 p. 739), et pour les comprimés de Suboxone° (buprénorphine + naloxone) présentés depuis 2013 dans des plaquettes unitaires avec film-sécurité, plus difficiles à ouvrir par des enfants (n° 342 p. 263 ; n° 362 p. 903). La quinine associée (Okimus°), autorisée dans les crampes, est sous plaquettes depuis fin 2012 et non plus en flacon-vrac, mais reste malgré tout un médicament à écarter (n° 297 p. 501 ; n° 352 p. 110).
Par contre, aucune amélioration n'a été constatée pour les comprimés à base de méthotrexate (Imeth°, Méthotrexate Bellon°, Novatrex°), ni pour Quinimax° comprimés (quinine + quinidine + cinchonine + cinchonidine) encore commercialisés en flacons-vrac sans bouchon-sécurité, alors que le contenu de ces flacons est mortel pour un enfant (n° 352 p. 101 ; n° 231 p. 585).
Les flacons du paracétamol buvable Dolko°, des sirops Toplexil° (oxomémazine), et de l'antiépileptique Zarontin° (éthosuximide) restent eux aussi dépourvus de bouchon-sécurité (n° 284 p. 428 ; n° 309 p. 494 ; n° 359 p. 649).
Une information parfois améliorée
L'étiquetage de certains médicaments a été amélioré. C'est le cas des ampoules d'adrénaline et d'atropine Renaudin° après que l'Afssaps (devenue depuis l'ANSM) ait finalisé en 2007 ses travaux d'harmonisation d'étiquetage des ampoules de plusieurs solutions injectables (n° 189 p. 749 ; n° 290 p. 903). Les mentions de dosages en fosphénytoïne et en équivalent phénytoïne sont mieux différenciées sur les boîtes de Prodilantin° (n° 201 p. 821). Et la quantité totale de ziconotide a été ajoutée sur la face principale des boîtes de Prialt° 100 microg/ml, solution pour perfusion, tandis que la dénomination commune internationale (DCI) a été ajoutée sur les étiquettes des flacons, mais en petits caractères (n° 316 p. 87).
Par contre, aucun progrès n'est constaté pour deux spécialités à base d'isotré tinoïne (Procuta° et Curacné°) : la mention de leur nom commercial reste proéminente par rapport à celle de cette substance fortement tératogène (n° 267 p. 819). Pour Nurofentabs° et Nurofenflash°
(ex-Nuroflash°), les boîtes ne mettent pas assez en valeur le nom de la substance, l'ibuprofène. Ceci peut favoriser d'une part la prise par mégarde de ces médicaments par une femme enceinte, et d'autre part un risque de surdose, notamment en automédication en cas d'utilisation concomitante d'autres spécialités à base d'ibuprofène (n° 264 p. 586, n° 319 p. 346).
Certaines notices sont devenues plus informatives, comme celle de Monuril° (fosfomycine) (n° 103 p. 3) (1). Par contre, les notices des anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) examinées restent insuffisantes concernant les risques encourus par le foetus lors des 2 premiers trimestres de grossesse (n° 352 p. 90 ; n° 340 p. 91 ; n° 328 p. 87 ; n° 304 p. 87 ; n° 292 p. 86).
Le plan de prises à deux cases des boîtes de Flixovate° (fluticasone), crème et pommade, qui exposait les nourrissons à des surdoses, a été supprimé (lire le Bilan 2013 du conditionnement des médicaments, disponible en cliquant ci-contre à droite)
Praticité : doit mieux faire
Le bilan est décevant concernant la mise à disposition de dispositifs doseurs adaptés. Une amélioration discutable est relevée pour l'éthosuximide (Zarontin°), avec l'ajout d'un gobelet gradué en ml dans la boîte. C'est mieux que de devoir utiliser une cuillère domestique, mais les gobelets sont peu précis et peu sûrs, un comble pour un anti épileptique (n° 309 p. 494 ; n° 338 p. 907).
Aucun progrès n'est constaté pour le lévétiracétam buvable à 100 mg/ml (Keppra°), dont les seringues orales restent graduées en millilitres, ce qui oblige à des calculs de conversion, sources d'erreurs de doses avérées et graves (2) (n° 327 p. 20).
Une absence d'amélioration est aussi notée depuis notre dernière analyse pour le vaccin
BCG SSI°, dont le flacon renferme toujours un volume équivalent à 10 doses ou 20 doses. Il reste fourni avec une seringue de capacité disproportionnée alors que des cas d'abcès au site d'injection associés à une surdose ont été rapportés (n° 267 p. 823 ; n° 285 p. 508).
Similitude entre conditionnements : de petits mieux
Les conditionnements de la solution buvable et du sirop de Dépakine° (acide valproïque) sont plus faciles à distinguer grâce à des couleurs différentes pour les boîtes et les pistons des seringues (n° 231 p. 593 ; n° 257 p. 16).
Même si un léger mieux est observé pour Atacand° (candésartan) et Hytacand° (hydrochlorothiazide + candésartan), les chartes graphiques de ces spécialités restent proches et sources de confusion (n° 226 p. 183).
Des présentations qui banalisent les médicaments
Certains conditionnements conservent un aspect inadéquat. La présentation de 120 g du gel Ketum° (kétoprofène) évoque toujours un tube de dentifrice (n° 202 p. 32). En automédication, les pastilles à sucer de flurbiprofène (Strefen°), un AINS, ressemblent toujours à des bonbons (n° 281 p. 183). La plupart des comprimés ou gélules de méthylphénidate sont en flacons-vrac (Concerta° LP, Ritaline° LP), ce qui est peu pédagogique sur le respect de la dose envers les enfants prenant ces amphétaminiques (n° 258 p. 86).
©Prescrire Février 2014
"Bilan 2013 du conditionnement des médicaments : une situation pourtant facile à améliorer" Rev Prescrire 2014 ; 34 (364) : 144-148. Pdf, accès libre
Note :
a- Depuis 1991, une vingtaine de médicaments cartons rouges ne sont plus commercialisés.
Référence :
1- ANSM "Notice-Monuril° 3 g, granulés pour solution buvable en sachets" 25 octobre 2010 : 5 pages.
2- Commission européenne "Notice-Keppra° 100 mg/ml, solution buvable" 26 août 2013 : 8 pages.