Marie-Odile Vincent, psychologue de formation, sensible à la vulnérabilité des personnes âgées, s'est formée pour devenir directrice d'Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad). Ce parcours lui a permis de constater l'existence d'un tabou de la mort dans de nombreux établissements, malgré des progrès faits dans le domaine des soins palliatifs. Son livre "Fin de vie en EHPAD, parlons-en !" présente une démarche originale qu'elle a menée dans l'Ehpad Jacques Bonvoisin à Dieppe, pour permettre aux résidents, aux équipes et aux familles de partager leurs appréhensions et leurs désirs sur ce temps de fin de vie (1).

L'ouvrage débute par une série de témoignages exprimant les souffrances que le déni de la mort entraîne pour les résidents, leurs familles et pour les personnels qui s'en occupent. Les résidents ne rechignent pas à parler de leur mort ; ce qui manque, ce sont « des interlocuteurs disponibles et prêts à entendre ce qu'ils ont à dire ». De leur côté, les personnels font état de leur désarroi et de leur impréparation face à cette demande. « Dans une société où la mort est un sujet qui fait peur, ils ne sont pas mieux armés que le reste de la population face à la fin de vie ». La souffrance des personnels face à la mort des résidents avec lesquels ils ont tissé des liens est sous-estimée. Par manque de formation et d'échanges, « la mort n'est pas identifiée comme un sujet de discussion » au sein du personnel.

Dans une deuxième partie du livre, à partir de l'expérimentation débutée à Dieppe en 2019, l'autrice propose une démarche pour « libérer la parole » dans des groupes auxquels participent des résidents et des membres du personnel. La réflexion à partir de certains des témoignages est approfondie dans le but de mettre en évidence le vécu de chacun, lorsqu'il a la possibilité de s'exprimer. Cela donne l'occasion à chacun de sortir de son isolement face à des situations vécues comme culpabilisantes. Le fait de trouver collectivement des manières d'aborder la question de la fin de vie semble un élément déterminant pour rompre le silence.

Cet ouvrage montre comment résidents et soignants peuvent définir ensemble ce que « pourrait être une fin de vie réussie en EHPAD ». Volontairement court, c'est une sorte d'inducteur, de catalyseur, d'un débat interne nécessaire à ce type d'institutions. Les chapitres de la partie « Éléments de réflexion » contribuent à élargir ce débat (a).

Destiné à être un support de communication pour les acteurs du secteur, ce livre de Marie-Odile Vincent peut être considéré comme le point de départ d'une démarche hautement souhaitable en Ehpad… et dans d'autres lieux de vie.

©Prescrire 1er octobre 2022

Note :
a- L'Ehpad Jacques Bonvoisin bénéficie de la réflexion éthique de la Fondation Partage et Vie. Cette fondation à but non lucratif gère plus d'une centaine d'Ehpad des Caisses d'Épargne.

Extraits de la veille documentaire Prescrire.
1- Vincent MO “Fin de vie en Ehpad, parlons-en !”, éd. Le Coudrier, Brignais 2021 : 96 pages. Disponible notamment auprès de l'Appel du Livre.

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• Textes complets :

"Prix Prescrire 2022" Rev Prescrire 2022 ; 42 (468) : IV de couverture. Accès libre.

"Lu pour vous. Fin de vie en EHPAD, parlons-en !" Rev Prescrire 2022; 42 (465) : 548. Réservé aux abonnés.