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Prix Prescrire 2015

Conférence-débat du Prix Prescrire 2015 :
"Futurs soignants : se former à l'indépendance"

Extraits des débats lors du Prix Prescrire 2015

Les interventions initiales des membres du collectif La Troupe du rire et des membres du Formindep ont suscité de nombreux échanges, dont voici quelques extraits

Débats du Prix Prescrire 2015
Bravo aux étudiants

« Je suis très heureux parce que je vois qu'il y a des jeunes qui ont les crocs. Donc bravo » médecin

Que faut-il enseigner sur l'indépendance ? et quand ?

« À votre avis, s'il s'agit de faire une formation à l'indépendance, à quel moment il faut la faire ? … dès le premier cycle ? seulement au second cycle ? … votre livret contribue vraiment à ça…je voudrais souligner une charte de légitimité : il s'appuie sur un document OMS qui s'appuie sur des études. Recevoir le Prix Prescrire, c'est un élément de plus qui permet de légitimer son introduction dans l'enseignement… Le fait que vous soyez des étudiants et que ce soit votre œuvre, ça légitime, puisque ce qui est produit par les pairs donne du crédit.
J'ai du mal à me représenter ce que veut dire "être formé à l'indépendance". On a plein de dépendances, être en société, être membre d'une association, c'est entrer dans un réseau d'affiliation qui crée des espèces de dépendances. Est-ce que l'indépendance est vraiment l'objectif que l'on cherche ou est-ce plutôt l'idée de travailler sur ses dépendances ? …» enseignant

« Plus on attend, plus il peut y avoir des réactions défensives…sur ce qui pourrait être perçu comme une critique de ce qu'on a fait, de ce qu'on a accepté des labos. Plus on est sensibilisé tôt, et moins ça fait mal.
« II faut surtout comprendre comment ça marche, comprendre que la santé c'est inclus dans le système politique dans lequel on est.... Quand on arrive en médecine…on n'a pas forcément une vision globale …du système de la santé, qui est très complexe d'ailleurs. Il n'est pas enseigné, pourtant c'est ce qui permet de comprendre beaucoup de choses… et on peut développer son esprit critique » étudiante

« C'est vraiment utile de s'approprier le curriculum que propose l'AMSA. Année par année, selon 5 axes, [elle] propose quelque chose de très concret et réaliste et …intégrable au cursus ». enseignant

Pas si simple d'éviter les firmes pharmaceutiques quand on est étudiant…

« [Refuser les firmes] c'est aussi une attaque envers les médecins parce qu'on critique leur manière de faire » étudiante

« Il y a des risques... On va être interne. Si on est en mauvais rapport avec notre hiérarchie parce qu'on a posé des questions qui dérangent, qu'on s'est un peu exposé, on vous catégorise… Être complètement isolé peut poser des problèmes. On ne va pas être formé aussi bien si on n'est pas considéré par nos chefs.
Tant que les choses ne sont pas développées et admises … on s'expose à des réactions hostiles.
Si on a une attitude claire, franche et qu'on dit les choses ça se passe très mal.
Je n'ai jamais dit non je n'irai pas [aux staffs avec labos]. Par contre je me suis toujours arrangé pour prendre un entrant [un patient] vingt minutes avant, avoir un ECG à faire pour finalement être occupé. Je n'y suis jamais allé et du coup je travaille dans de bonnes conditions avec des gens qui n'ont pas mes idées » étudiant

…mais possible…

« Il y a des possibilités d'échapper à la répression pour ceux qui veulent faire preuve d'indépendance. Je me suis fait avoir lors de mon premier semestre [d'internat] – en arrivant on est un peu naïf, on ne comprend rien à ce qui vous arrive, donc je me suis trouvée coincée à des staffs de l'industrie pharmaceutique. Au deuxième semestre, le premier jour je l'ai dit cash : je ne reçois pas la visite médicale. Ça s'est hyper bien passé. J'ai eu un chef de service génial, qui faisait la police pour moi : "ce n'est pas la peine d'aller dans le service, l'interne ça ne l'intéresse pas". Le semestre d'après, ça s'est très mal passé : le chef de service l'a très mal pris et a essayé de me coincer tout le semestre. Je m'en suis sortie en prenant des gardes la veille des staffs. Expliquer pourquoi on n'y va pas en particulier avec les équipes, les infirmiers, les aides-soignantes et même le dire aux patients : c'est une bonne façon de sortir de l'isolement » interne en médecine générale

« La dimension collective est primordiale et c'est tout l'enjeu de la diffusion de l'information. Des gens qui ne sont pas au courant du jeu des influences, sont susceptibles de changer du moment qu'ils sont au courant » étudiant 

« Il y a un projet de nouveau module [dans les études] d'information sur le médicament. On a insisté pour que dans ce module, il y ait une explication sur tout le système, [notamment] pour identifier les techniques lobbying etc. Les initiatives étudiantes sont la meilleure chose qui puisse nous arriver à tous » étudiant

…et primordial

« Du point de vue de l'intérêt des patients, on voit que la première dépendance, c'est par rapport à soi-même, puisqu'en tant qu'être humain, on est d'abord intéressé par soi-même. …Et c'est là-dessus que jouent ceux qui ont d'autres intérêts, pour influencer le soin et la médecine, et la santé.
La première démarche est d'être conscient de cela, d'être au clair avec ses propres dépendances et les influences qu'on reçoit, celles de beaucoup d'agents politiques, administratifs, financiers, industriels commerciaux.
Une fois qu'on a dit ça, il y a toujours le risque de noyer de poisson. On peut dire qu'il y en a tellement [des influences] qu'on s'arrête. C'est là qu'interviennent les données de la science... Quand on voit celles [les influences] qui ont une influence directe et démontrée sur …la santé des patients, il y a une priorité, c'est l'influence des intérêts industriels et commerciaux, donc en priorité l'industrie pharmaceutique. Les données ne manquent pas et elles sont importantes et réelles. C'est ce qui fait passer la notion de conflit d'intérêts ou d'influence d'une [dimension] éthique ou morale à une [dimension] de santé publique.
À partir de là, on regarde où … ces influences là, qui sont responsables de dizaines de milliers de morts – on ne parlera jamais assez du Vioxx°, un archétype de cette situation – …s'exercent, où c'est le plus fort. C'est à l'hôpital et à l'université …» médecin

« Il faudrait aussi que les internes de spécialités s'y mettent » médecin

« Le grand public, les patients ne sont pas du tout au courant de ce qui se passe à la faculté. Les grands scandales des médicaments ont sensibilisé le grand public aux relations entre l'industrie et les experts, on a beaucoup parlé des leaders d'opinion, mais que leur médecin traitant soit lui-même sous influence et surtout ait été formaté pendant ses études, est une notion que les gens n'ont pas... Il faut qu'il y ait un mouvement général,… qu'il y ait plus d'information du public » journaliste

Débat du Prix Prescrire 2015Débat du Prix Prescrire 2015Débat du Prix Prescrire 2015

Les étudiants en pharmacie aussi :

« On parle beaucoup d'information des médecins. Mais face à …des [étudiants] pharmaciens pas du tout habitués à ce qu'on les questionne sur l'indépendance, sur les liens d'intérêts et le pouvoir de l'industrie, c'est une autre histoire. Ce qu'on essaie de faire, c'est …d'amener les étudiants à travers un jeu de rôles à comprendre les intérêts de chacun et de se poser des questions sur leur future profession de pharmacien » enseignante

Et beaucoup d'autres prises de parole sur les conflits d'intérêts et les influences en dehors des hôpitaux et des universités.

Intervention de la Troupe du rire au Prix Prescrire 2015  > LES INTERVENTIONS  
Les vidéos des interventions
de La Troupe du rire et des
membres du Formindep

©Prescrire 15 octobre 2015