Quelle que soit la méthode utilisée, la kinésithérapie respiratoire n'accélère pas la guérison des nourrissons atteints de bronchiolite, alors qu'elle expose notamment à des fractures de côtes. Dans la bronchiolite, la balance bénéfices-risque de la kinésithérapie respiratoire est défavorable.
Les bronchiolites des nourrissons sont des infections virales fréquentes, parfois graves chez certains nourrissons, mais le plus souvent d'évolution spontanément favorable (1). En 2010, la kinésithérapie respiratoire n'avait pas d'efficacité prouvée pour accélérer la guérison des nourrissons atteints de bronchiolite (2). Mi-2012, dispose-t-on de nouvelles données d'évaluation ?
Une synthèse méthodique d'un groupe du Réseau Cochrane a recensé neuf essais randomisés kinésithérapie respiratoire versus absence de kinésithérapie respiratoire, chez 891 des nourrissons hospitalisés pour bronchiolite (3). Aucun essai chez des enfants non hospitalisés n'a été recensé.
La technique de percussions et vibrations thoraciques associées au drainage postural a été évaluée dans cinq essais, chez 246 nourrissons. La technique d'accélération du flux respiratoire avec toux provoquée, préconisée en France, a été évaluée dans quatre essais, chez 645 nourrissons (3).
Que les nourrissons aient été traités ou non par kinésithérapie respiratoire, aucune différence statistiquement significative n'a été observée en termes d'évolution d'un score clinique de sévérité, de saturation en oxygène, de fréquence respiratoire, de durée de la maladie ou de l'hospitalisation, quelle que soit la méthode de kinésithérapie utilisée (3). Avec ou sans kinésithérapie respiratoire, la durée moyenne de la maladie a été d'environ 13 jours.
Les principaux effets indésirables rapportés dans ces essais ont été une désaturation en oxygène pendant la séance, et des vomissements avec la technique d'accélération du flux expiratoire (3). Outre un inconfort, la kinésithérapie respiratoire expose les nourrissons à d'autres effets indésirables, notamment des douleurs et des fractures de côtes. Selon une étude rétrospective conduite dans des hôpitaux parisiens, le risque a été d'une fracture pour 1 000 nourrissons traités (1,4).
En pratique : pas de kinésithérapie respiratoire en cas de bronchiolite. En 2012, on dispose de données solides montrant que, chez les nourrissons atteints de bronchiolite, la kinésithérapie respiratoire a une balance bénéfices-risques défavorable, y compris avec la technique habituellement utilisée en France. Mieux vaut épargner cette épreuve aux bébés.
©Prescrire 1er décembre 2012
Précisions et corrections
Notre texte du n° 350 de décembre 2012 et le communiqué de presse l'accompagnant au sujet de la kinésithérapie respiratoire des nourrissons atteints de bronchiolite ont provoqué beaucoup d'émotion. Ce texte et ce communiqué de presse sont trop laconiques.
Nous aurions dû souligner que l'évaluation clinique disponible de la kinésithérapie dans la bronchiolite, telle que recensée et synthétisée par le groupe du Réseau Cochrane, ne concerne que les nourrissons hospitalisés. Cette évaluation a montré une absence d’efficacité, et des effets indésirables. Le constat d'une balance bénéfices-risques défavorable est valable pour cette situation.
Pour ce qui est des nourrissons atteints de bronchiolite pris en charge en soins ambulatoires, le groupe du Réseau Cochrane n'a recensé aucun essai comparatif randomisé évaluant la kinésithérapie respiratoire. Les résultats des essais menés à l'hôpital rendent peu probable que la kinésithérapie respiratoire ait en soins ambulatoires une balance bénéfices-risques favorable en termes d’évolution de la sévérité, de saturation en oxygène, ou de fréquence respiratoire ; mais les données de l'évaluation ne permettent pas d'exclure des bénéfices sur d'autres critères cliniques.
En pratique, à l'hôpital, il est justifié de ne pas proposer de kinésithérapie respiratoire en traitement de la bronchiolite. En soins ambulatoires, faute de données fournies par des essais comparatifs, la kinésithérapie respiratoire systématique n'est pas justifiée. Sa balance bénéfices-risques reste à évaluer de manière comparative rigoureuse sur des critères tangibles et pertinents.
©Prescrire 12 décembre 2012 |
"Bronchiolites : pas de place pour la kinésithérapie respiratoire" Rev Prescrire 2012 ; 32 (350) : 927. (pdf, réservé aux abonnés)
Extraits de la veille documentaire Prescrire.
1- Prescrire Rédaction "Bronchiolite : pas de kinésithérapie respiratoire systématique. Absence d'efficacité démontrée mais risque de fracture de côtes" Rev Prescrire 2006 ; 26 (277) : 768-770.
2- Prescrire Rédaction "Bronchiolite : un essai négatif pour la kinésithérapie respiratoire" Rev Prescrire 2010 ; 30 (325) : 849.
3- Roqué i Figuls M et coll. "Chest physiotherapy for acute bronchiolitis in paediatric patients between 0 and 24 months old" (Cochrane Review) (dernière révision 2011). In : "The Cochrane Library", John Wiley and Sons Chichester 2012 ; Issue 8 : 36 pages.
4- Prescrire Rédaction "Bronchiolite, kinésithérapie et fractures de côtes (suite)" Rev Prescrire 2007 ; 27 (288) : 794-796.