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Acide valproïque (Dépakine° ou autre) et femmes enceintes : des années perdues

Pris par les femmes enceintes, l'acide valproïque expose les enfants à naître à des malformations, et ensuite à des troubles du développement psychomoteur. Une information connue des abonnés à Prescrire depuis des années.

L'acide valproïque, ou valproate de sodium (Dépakine° ou autre), est un médicament autorisé dans les épilepsies et, comme ses dérivés le divalproate de sodium (Dépakote°) et le valpromide (Dépamide°), dans les troubles bipolaires.

Comparé à d'autres antiépileptiques utilisés seuls, l'acide valproïque expose davantage l'enfant à naître à des effets indésirables graves, et cela de façon dose-dépendante.
L'acide valproïque est tératogène : l'enfant exposé in utero  risque des malformations telles que des anomalies de fermeture du tube neural (spina bifida), des anomalies urogénitales, craniofaciales, etc. L'enfant risque ensuite des effets à long terme tels que autismes, diminutions du quotient intellectuel, retards du développement moteur et du langage.

L'utilisation de l'acide valproïque est déconseillée tout au long de la grossesse et chez les femmes en âge d'être enceintes et sans contraception efficace. Son utilisation chez les femmes enceintes ou en âge de procréer est nettement plus encadrée en France depuis 2015.

Ces graves effets sur l'enfant à naître ont été découverts peu à peu après la mise sur le marché de l'acide valproïque. Ils ont été trop longtemps trop peu pris en compte par les firmes commercialisant ce médicament, les agences françaises et européennes du médicament, et de nombreux soignants. Il aura fallu que des familles de victimes portent plainte en 2015 pour qu'éclate une "affaire Dépakine°". Le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) publié en février 2016 sur le sujet souligne notamment les faiblesses de l'Agence française du médicament dans le domaine de la pharmacovigilance.

En 2006, la revue Prescrire s'est faite l'écho d'une étude réalisée par le Centre régional de pharmacovigilance de Toulouse qui montrait que beaucoup de soignants ignoraient les effets malformatifs de l'acide valproïque pendant la grossesse. En 2009, la revue Prescrire a publié un article de fond de 5 pages sur les effets indésirables à long terme de l'acide valproïque (et d'autres antiépileptiques) sur les enfants exposés in utero, et sur les mesures à prendre en pratique.

Les recommandations de l'IGAS sur le renforcement de l'Agence du médicament dans le domaine de la pharmacovigilance sont bienvenues. Mais il existe des soignants qui se sont donné les moyens de ne pas dépendre totalement des firmes et des agences pour connaître l'évolution de la balance bénéfices-risques des médicaments et mieux prendre en charge les patients : les 30 000 soignants abonnés à Prescrire sont informés depuis longtemps des effets indésirables de l'acide valproïque, comme ils l'étaient pour le benfluorex (Mediator°) et de nombreux autres médicaments.

©Prescrire 24 février 2016

En savoir plus :

Acide valproïque : des effets
à long terme sur les enfants
exposés in utero
Rev Prescrire 2009 ;
29 (311) : 667-671.
Pdf, réservé aux abonnés

Mauvaise perception par
les soignants des risques
des médicaments
pendant la grossesse
Rev Prescrire 2006 ;
26 (276) : 675.
Pdf, réservé aux abonnés

Acide valproïque pendant
une grossesse : risques
de déficits cognitifs et
d'autisme pour l'enfant
Rev Prescrire 2013 ;
33 (361) : 874.
Pdf, réservé aux abonnés

Acide valproïque
in utero : autisme
Rev Prescrire 2013 ;
33 (362) : 915.
Pdf, réservé aux abonnés