Revue Prescrire, article en une, suite, Europe et médicament juillet 2004
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Europe et médicament :
Ce qui change avec la nouvelle législation
Indépendance des agences : de petits progrès

Le financement des agences chargées du médicament est aujourd'hui majoritairement constitué des redevances payées directement par les firmes pharmaceutiques, notamment pour l'examen de leurs demandes d'AMM (12). Les spécialistes qui travaillent auprès de ces agences étant par ailleurs souvent impliqués dans l'évaluation des médicaments pour le compte des firmes, l'influence des firmes sur les agences est considérable (13). Dans les textes réglementaires jusqu'à présent en vigueur, la question des conflits d'intérêts était peu abordée : absente de la Directive, elle figurait succinctement dans un article du Règlement.

Déclaration publique des intérêts particuliers
La Directive 2004 demande désormais aux États membres de veiller « à ce que les agents (…) chargés d'accorder les autorisations, les rapporteurs et les experts (…) n'aient dans l'industrie pharmaceutique aucun intérêt financier ou autre qui pourrait nuire à leur impartialité. Ces personnes font chaque année une déclaration de leurs intérêts financiers » (D article 126 ter).
Le Règlement 2004 précise que les intérêts financiers des membres du Conseil d'administration, des membres des comités, des rapporteurs et des experts auprès de l'Agence européenne du médicament doivent être déclarés « chaque année ». Le même article oblige à une déclaration « à chaque réunion, eu égard aux points de l'ordre du jour » des intérêts particuliers qui pourraient être considérés comme préjudiciables » à l'indépendance de ces personnes. Et il ajoute : « Ces déclarations sont rendues accessibles au public » (R article 63-2).

Davantage de financement public de la pharmacovigilance

D'autre part, la Directive stipule que « La gestion des fonds destinés aux activités relatives à la pharmacovigilance, au fonctionnement des réseaux de communication et à la surveillance du marché est sous le contrôle permanent des autorités compétentes afin de garantir leur indépendance » (D article 102 bis), ce qui n'impose pas, hélas, que les fonds soient d'origine publique.
Le Règlement 2004 est plus clair pour ce qui concerne les activités de pharmacovigilance de l'Agence européenne  : ces activités « bénéficient d'un financement public (NDLR : c'est-à-dire par le budget communautaire) suffisant à la hauteur des tâches conférées » (R article 67).
La base européenne de données sur les médicaments accessible au public (c), dont la création est prévue par le Règlement 2004, doit en outre être établie, actualisée et gérée par l'Agence « de manière indépendante vis-à-vis des firmes pharmaceutiques » (R article 57-1-l).

Ces obligations peuvent paraître minimales. Mais dans une période où les firmes pharmaceutiques tendent à financer tout ce qui relève du domaine public, de telles mesures sont une belle victoire de ceux qui se battent pour l'indépendance des agences du médicament.

©La revue Prescrire 1er juillet 2004
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Notes
c- Il s'agira d'une nouvelle base, au contenu élémentaire  : elle ne contiendra que le texte des notices, mais elle aura l'avantage de recenser à terme tous les médicaments commercialisés en Europe, qu'ils aient été autorisés par la procédure nationale ou européenne centralisée.
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Références
12- Prescrire Rédaction "Le financement des agences du médicament" Rev Prescrire 1999 ; 19 ( 201) : 867-868.
13- Prescrire Rédaction "Conflits d'intérêts à l'Agence du médicament" Rev Prescrire 1999  ; 19 (194) : 301-302.