Plus de 4 100 plaignants attendent des réponses dans le désastre du Mediator°.
Maître Charles Joseph-Oudin, avocat de 250 victimes, analyse les enjeux du procès pénal, qui devrait durer six mois. Des propos recueillis fin août 2019 par Prescrire avant l'ouverture du procès Mediator°.
D'autres conséquences financières sont en vue pour la firme : il lui est reproché d'avoir trompé les assureurs maladie obligatoire et complémentaires pour le remboursement de la spécialité Mediator°…
Si le tribunal reconnaît ce délit (on parle d'« escroquerie »), la sanction financière consistera pour la firme à rembourser les assureurs pour un montant dépassant le demi-milliard d'euros.
L'enjeu, c'est aussi que la justice envoie un message ferme, à visée prophylactique, aux firmes pharmaceutiques. Il s'agit de leur signifier qu'il n'est plus possible, sous peine d'énormes sanctions financières, de faire le choix économique de maintenir sur le marché un produit visé par des alertes sur la santé des patients, ni de parier sur un système juridique défaillant.
Il arrive fréquemment, en droit boursier ou de la concurrence, qu'un opérateur économique doive s'acquitter, en cas de sanction, d'un multiple du profit réalisé, dix fois par exemple. La régulation du juge doit passer par ce qui fait mal aux firmes, leurs finances.
À l'inverse, le fait qu'il y ait eu en France peu de procès Isoméride°, avec des broutilles en guise de sanctions financières à régler pour la firme, a envoyé un signal n'incitant pas assez à mieux faire.
Par-delà la réparation, c'est-à-dire les indemnités accordées aux victimes, le juge doit, dans l'appréciation du préjudice moral, prendre en compte le caractère lucratif du manquement de la firme.
Le désastre du Mediator° a entraîné une refonte de l'Agence du médicament, l'édiction de nouvelles règles, sur la déclaration des conflits d'intérêts notamment ; la justice doit continuer à tracer le chemin. Avec ce procès de santé publique, elle doit participer, elle aussi, à la création d'un environnement plus sain, plus sûr, pour les patients.