Ronds de jambe

Pour évaluer un nouveau médicament, le choix du comparateur est une affaire sérieuse. Il en va de la fiabilité de l'évaluation et de l'intérêt des patients. Mais il en va aussi des intérêts de la firme, car c'est entre autres des résultats de ces comparaisons que dépend l'avenir commercial du médicament. Moins le comparateur est efficace ou plus il est nocif, et plus la firme a de chances de présenter le nouveau médicament sous un angle favorable.

Il est ainsi logique pour toutes les parties prenantes de porter une attention particulière au choix du comparateur. Est-il éthique que les patients d'un groupe témoin reçoivent un placebo ? Faut-il choisir comme comparateur le médicament de référence au vu des données de l'évaluation, ou celui qui est le plus utilisé dans la pratique courante, grâce à une promotion habile ? Qui fait ce choix ? Comment est-il justifié ?

Les agences du médicament doivent être fermes, protégeant l'intérêt des citoyens face aux firmes, qui sont juge et partie dans ce choix.

Dans le cas du tivozanib (Fotivda°) dans les cancers du rein métastasés, la Commission d'autorisation de mise sur le marché de l'Agence européenne du médicament (EMA) a affirmé, à raison, que le sunitinib (Sutent°) est le comparateur de choix dans cette situation, le sorafénib (Nexavar°) étant moins efficace selon cette Commission. Mais, de façon paradoxale, elle a accepté une évaluation avec le sorafénib comme comparateur principal (lire aussi "tivozanib (Fotivda°) et cancer du rein métastasé"). Heureusement, en France, la Commission de la transparence n'a pas été dupe, et s'est prononcée contre le remboursement.

Une fois encore, face aux ronds de jambe d'une firme, l'Agence s'incline. Aux soignants et aux patients de ne pas entrer dans cette mauvaise danse.

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