Les "déserts médicaux" sont une réalité préoccupante dans de nombreux territoires de France, en ville comme à la campagne. Des enquêtes réalisées dans d'autres pays concernés par ce problème montrent que, dans leur choix d'installation, les médecins sont influencés par leurs origines sociales et territoriales. Et aussi par les conditions locales de travail et de vie, pour eux-mêmes et leurs proches. Des expériences montrent que des mesures uniquement contraignantes ou uniquement financières sont insuffisantes, voire inefficaces, pour résoudre le problème (lire aussi ""Déserts médicaux" : les pistes tirées d'expériences menées hors de France").
Alors comment prendre en compte certains déterminants des choix d'installation aujourd'hui mieux connus ?
On comprend que les patients vivent mal de ne pas trouver de médecin généraliste qui accepte de nouveaux patients en tant que médecin traitant, ou qui se rende à domicile, ou qui soit facilement joignable. Ou encore de ne pas pouvoir obtenir d'avis spécialisé à proximité de leur lieu de vie, ou sans attendre de nombreux mois.
On comprend aussi que des étudiants en médecine générale n'aient pas envie que soit ajoutée à leurs études déjà très longues une année supplémentaire, à effectuer en priorité dans des zones dites sous-denses. Qu'ils exigent que ces stages soient avant tout des lieux de formation de qualité, ce qui nécessite qu'ils y soient bien encadrés. Et qu'ils n'aient pas envie de colmater la brèche causée par des erreurs ou insuffisances dont ils ne sont pas responsables.
On comprend que les responsables politiques ne puissent pas laisser la situation empirer et doivent prendre des mesures, si les organismes représentatifs des professionnels de la santé et l'assurance maladie n'en proposent pas. D'autant plus que le constat ne concerne pas que la médecine générale, mais aussi diverses autres spécialités, et de nombreux établissements de santé ou d'hébergement pour personnes âgées dépendantes qui manquent de médecins, infirmières et aides-soignantes.
Ce désengagement vis-à-vis de certains territoires ne concerne pas que les métiers du soin. Des zones sont aussi devenues "sous-denses" pour d'autres services publics, l'enseignement, les transports, la culture, les commerces de proximité, etc. Les déserts médicaux sont le symptôme d'autres pénuries, d'autres appauvrissements. Et la conséquence directe de politiques d'abandon de services publics, de territoires et de populations.
Les patients, que nous sommes ou serons un jour, et les citoyens en général, ont tout intérêt à inciter les responsables politiques à revoir leurs analyses et leurs priorités. Afin d'œuvrer de manière durable à un accès pour tous à des soins et des services de qualité, fondé sur une revalorisation des métiers et de l'action sociale.