Dans l'idéal, un examen diagnostique devrait permettre de distinguer sans erreur les personnes malades des personnes non malades. Or, les résultats d'un examen diagnostique courant ne sont pas toujours confirmés par l'examen dit de référence (alias "gold standard"), c'est-à-dire l'examen qui est censé permettre de retenir ou d'exclure un diagnostic à coup sûr.
En pratique courante, dans de nombreuses situations cliniques, on ne recourt pas à l'examen de référence pour prendre une décision de soins. Pour de multiples raisons : l'évolution sans traitement de l'affection qui paraît la plus probable au vu des données cliniques est spontanément favorable ; l'examen de référence expose à trop de risques au regard de ce qu'il apporte de plus que des examens courants et sans grand danger ; les données recueillies par l'examen clinique et quelques examens paracliniques simples semblent suffire à retenir ou écarter un diagnostic à bon escient ; le délai pour accéder à l'examen de référence n'est pas adapté à la situation ; etc.
Les soignants sont alors conduits à manier un ensemble d'informations cliniques ou paracliniques, en prenant en compte les limites de leurs performances diagnostiques. C'est-à-dire l'éventualité de résultats faux positifs (quand l'examen n'est pas assez spécifique) ou faux négatifs (quand il n'est pas assez sensible), avec parfois des conséquences délétères pour les patients. Sans prise en compte de ces limites, la gestion de l'incertitude qui entoure les résultats de tels examens est peu rationnelle.
C'est dire l'intérêt qu'auraient des signes cliniques ou des examens paracliniques permettant à eux seuls d'établir un diagnostic sans erreur possible. Quand un signe clinique se rencontre seulement dans une maladie déterminée, on dit qu'il est pathognomonique. Sa présence suffit alors à affirmer le diagnostic, tout simplement. Quel soulagement pour des étudiants d'apprendre que certains signes sont pathognomoniques d'une affection ! Et quelle formidable garantie de certitude diagnostique pour les soignants qui rencontreront de tels signes !
Certains signes cliniques appris à la faculté sont dits pathognomoniques. Mais le sont-ils vraiment ? Sur quoi reposent de telles assertions ? Prescrire s'est posé ces questions à propos du signe de Koplik, souvent considéré comme pathognomonique d'une rougeole (lire aussi "Signe de Koplik et rougeole"). Les conclusions de ce texte surprendront peut-être certains lecteurs. Et inviteront chacun à se poser ces questions au-delà de cet exemple.