En France comme dans d'autres pays, la consommation des neuroleptiques (alias antipsychotiques) est en forte augmentation depuis la mise sur le marché des neuroleptiques dits de seconde génération (ou "atypiques") à partir des années 1980 : amisulpride, aripiprazole, clozapine, olanzapine, quétiapine, rispéridone (1). Cette augmentation est-elle médicalement justifiée ?
Une utilisation croissante, notamment hors troubles psychotiques
Une équipe de pharmaco-épidémiologistes de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) souligne que la prescription des neuroleptiques dits atypiques s'est développée rapidement dans les années 1990, au motif d'un profil d'effets indésirables annoncé meilleur que celui des neuroleptiques dits de première génération (1).
Pourtant, s'ils exposent à moins d'effets indésirables neurologiques à court terme que des neuroleptiques tels que l'halopéridol, ils ont des effets indésirables métaboliques plus marqués, tels que des diabètes et des dyslipidémies. D'une manière générale, les neuroleptiques exposent aussi à une surmortalité (1,2).
Leur prescription a pourtant continué d'augmenter, notamment hors autorisation de mise sur le marché (AMM), comme dans les troubles anxieux, les troubles de l'humeur et les démences (1). Y compris chez les enfants et adolescents, comme par exemple dans les troubles déficitaires de l'attention avec hyperactivité et l'autisme (1).
Engouement à risque
Les auteurs estiment que cette utilisation large de neuroleptiques est préoccupante notamment en raison des troubles cardiaques et de la surmortalité auxquels ils exposent. Ils s'inquiètent de leur banalisation chez les enfants et adolescents, en l'absence de données sur leur impact potentiel sur des cerveaux en développement (1).
Un tel engouement a déjà été observé lors de la mise sur le marché des antidépresseurs dits sélectifs de la recapture de la sérotonine (d'abord la fluoxétine) (1).
Dans les deux cas, de nouveaux médicaments présentés, notamment par les firmes, comme ayant un meilleur profil d'effets indésirables, supplantent des médicaments plus anciens, dont l'efficacité est avérée et les effets indésirables plutôt mieux connus (1).
Les patients risquent d'être victimes de l'attention portée par les soignants aux effets nocifs des médicaments, quand les décisions se fondent davantage sur des espoirs et des messages commerciaux, que sur des données solides.
Noms commerciaux des médicaments en France F, Belgique B et Suisse S
amisulpride – F B CH SOLIAN° ou autre
aripiprazole – F B CH ABILIFY° ou autre
clozapine – F B CH LEPONEX° ou autre
fluoxétine – F B PROZAC° ou autre ; CH FLUCTINE° ou autre
halopéridol – F B CH HALDOL°
olanzapine – F B CH ZYPREXA° ou autre
quétiapine – F XEROQUEL LP° ou autre ; B CH SEROQUEL° ou autre
rispéridone – F B CH RISPERDAL° ou autre