Scoops santé : largement trompeurs

Il ne se passe guère de mois sans l'annonce d'une découverte extraordinaire qui va révolutionner la médecine. Ces annonces médiatiques donnent l'image d'un progrès rapide et sans fin. Qu'en est-il de leur fiabilité ?

L'attrait des mirages

Une équipe française a étudié la couverture médiatique dans la presse grand public anglosaxonne d'études scientifiques portant sur le lien entre douze maladies (dépression, maladie de Parkinson, cancers du sein, etc.) et des facteurs de risque liés au mode de vie (tabac, consommation de viande, etc.) ou à d'autres facteurs, par exemple génétiques (1). Parmi les 4 723 études et 306 méta-analyses retenues étudiant ces liens, 156 études et 5 méta-analyses ont fait l'objet d'au moins un article dans la presse grand public (1 561 articles recensés au total) parmi ceux recensés dans une base de données internationales d'articles de presse (1).

Les publications scientifiques premières sur un objet d'étude ont davantage été couvertes par la presse grand public que les publications ultérieures portant sur le même objet. Les publications premières aux résultats "négatifs" (montrant par exemple l'absence du lien recherché) n'ont jamais été couvertes. Les publications ultérieures ou les méta-analyses qui invalidaient une publication première déjà médiatisée n'ont pratiquement jamais fait l'objet d'articles dans la presse grand public (1).

De fait, la presse grand public semble surtout intéressée par les études aux résultats "positifs", et par celles décrivant une association avec certains modes de vie. Cela donne une image largement biaisée des résultats de la recherche puisque les deux tiers des résultats d'une première étude ne sont pas confirmés ensuite, soit un taux de confirmation nettement inférieur à celui des résultats d'études ultérieures sur le même objet d'étude (1).

Des commentaires orientés

Une autre étude sur la presse grand public a porté sur les commentaires accompagnant la présentation des résultats d'une nouvelle recherche (2). Les auteurs ont étudié la couverture médiatique grand public d'études cliniques publiées dans sept revues de renom (Lancet, BMJ, etc.) durant les trois premiers mois de 2013 (2).

Parmi les 591 documents médiatiques étudiés, 104 étaient accompagnés de commentaires rédigés par une personne extérieure au journal. 25 % de ces commentateurs n'avaient pas de qualification pertinente sur le sujet traité. Le commentateur avait un conflit d'intérêts académique dans 56 cas (dont 25 divulgués dans l'article) et financier dans 33 cas (dont 11 divulgués). L'enthousiasme du commentateur pour les résultats de l'étude était fortement corrélé à ses liens d'intérêts… (2).

Les médias grand public rendraient un meilleur service en relativisant les résultats des études initiales, en présentant leurs limites, et en se fiant moins aux personnes trop intéressées par la mise en valeur des résultats.

©Prescrire

Extraits de la veille documentaire Prescrire

1- Dumas-Mallet E et coll. "Poor replication validity of biomedical association studies reported by newspapers" PLoS One 2017 ; 12 (2) : e0172650  : 15 pages.

2- Wang MTM et coll. "Conflict of interest and expertise of independent commenters in news stories about medical research" CMAJ 2017 ; 189 (15) : 553-559.