L'autorisation de mise sur le marché (AMM) d'un médicament évolue au fil du temps : découverte ou confirmation de risques parfois graves, ajout de données chez des patients souvent écartés des essais cliniques (enfants, femmes enceintes, insuffisants rénaux, etc.), changement des posologies, restriction ou extension des indications, nouvelle contre-indication, etc. Ces évolutions conduisent à modifier le résumé des caractéristiques (RCP), destiné plutôt aux soignants (annexe I de l'AMM), et la notice, destinée aux patients (annexe IIIb).
La notice est le document d'information obligatoire destiné aux patients (article R. 5141-76 du Code de la santé publique). La présence d'une notice dans la boîte est un élément important de la sécurité des soins.
Diverses autorités à l'origine des notices : situation complexe
La notice est proposée par la firme lors d'une demande d'AMM ou de variation d'AMM, et validée par les autorités de santé. Elle fait l'objet de tests de lisibilité (1). Les AMM pour les médicaments commercialisés en France proviennent soit de l'Agence française des produits de santé (ANSM), soit de la Commission européenne après évaluation par l'Agence européenne du médicament (EMA). Les RCP et notices figurent alors sur les sites internet soit de l'ANSM, soit de la Commission européenne ou/et de l'EMA, parfois avec des dates différentes (lire le tableau ci-dessous).

En cas de réévaluation européenne pour raison de pharmacovigilance d'un médicament parfois ancien non autorisé par la Commission européenne (mais autorisé autrefois par chaque État membre concerné), c'est l'EMA qui arbitre après examen des données et émet des recommandations pour toute l'Union européenne. Ce processus est appelé "arbitrage" dans le jargon réglementaire. Dans ce cas, les RCP et notices révisés apparaissent d'abord, selon les cas, sur les sites internet de la Commission européenne ou de l'ANSM.
En France, il existe des autorisations dérogatoires permettant aux patients d'accéder à certains traitements pour lesquels aucune AMM n'a été accordée. Il s'agit des autorisations temporaires d'utilisation (ATU) nominatives ou de cohorte et des recommandations temporaires d'utilisation (RTU), toutes délivrées par l'ANSM. L'Agence publie sur son site internet les RCP et notices des ATU de cohorte. Pour les RTU, l'information destinée aux soignants et aux patients se trouve au sein d'un protocole.
Trouver la dernière version d'une notice : parcours du combattant
Lorsque l'ANSM ou la Commission européenne autorisent la mise à jour d'une notice, par exemple l'ajout de mentions d'effets indésirables graves, il faut ensuite quelques mois pour que soient écoulées sur le marché les boîtes contenant la version antérieure. L'Atelier conditionnement de Prescrire constate régulièrement quantité de boîtes contenant une notice d'une version antérieure à celle actualisée par les agences.
Quand c'est la Commission européenne qui octroie l'AMM (autorisation initiale ou ses variations), les RCP, notice et décision d'autorisation sont disponibles sur le site internet de la Commission. Ils sont regroupés dans un dossier commun, le RCP et la notice se trouvant dans le document d'annexes, non daté. Seule la décision est datée et permet indirectement d'identifier la date du RCP et de la notice.
Mais depuis quelques années, la Commission européenne ne publie plus toutes les décisions et leurs annexes au fur et à mesure des variations, et se limite la plupart du temps à des mises à jour annuelles.
Sur le site internet de l'EMA, la section "Product information" du dossier d'un médicament comporte aussi une édition de la notice sans les versions antérieures. La date figurant dans la section "Product information" est celle de la dernière variation de l'AMM prise en compte. Il faut en déduire qu'il s'agit de la date de la notice accessible.
L'exemple suivant illustre la situation.
Un exemple concret
Suite à une réévaluation européenne, il a été ajouté dans la notice de la nicardipine injectable (Loxen°) des mentions relatives à un effet indésirable grave, l'œdème pulmonaire aigu, en cas d'utilisation comme tocolytique pendant la grossesse (n° 366 p. 262). Les AMM de Loxen° injectable ont été accordées à l'origine par chaque État membre concerné. La réévaluation a donc fait l'objet d'un arbitrage par l'EMA, entériné le 20 décembre 2013 par la Commission européenne (2).
Dans le conditionnement que nous avons acheté en officine début 2014, la notice datait de septembre 2011 (3). Puis, début avril 2014, nous avons constaté que dans le Répertoire des spécialités pharmaceutiques de l'ANSM figurait encore une notice d'avril 2013, antérieure à la réévaluation. Pourtant la nouvelle notice découlant de la réévaluation de décembre 2013 figurait depuis 2014 sur le site de la Commission européenne. Par conséquent, début 2014, au moins 3 versions de la notice de Loxen° injectable étaient accessibles, avec un différentiel de 26 mois.
bibliographie
1- Commission européenne "Notice to applicants. Guideline on the packaging information of medicinal products for human use authorised by the Union. Revision 14.4" juillet 2018 : 45 pages.
2- Commission européenne "Referral-Nicardipine" 20 décembre 2013 : 26 pages.
3- Novartis "Notice boîte-Loxen° injectable" Lot S0531 : 2 pages.