La firme Servier et l'Agence française du médicament condamnées

Résumé

Un procès en appel aura lieu.

Fin mars 2021, le tribunal judiciaire de Paris a jugé la firme Servier et son ancien numéro 2 Jean-Philippe Seta coupables de « tromperie aggravée par la mise en danger de l'homme » et d'« homicides et blessures involontaires », pour avoir longtemps dissimulé la réalité des propriétés de Mediator° (benfluorex), avec des risques de valvulopathie et d'hypertension artérielle pulmonaire. La firme Servier a été condamnée à une amende de 2,7 millions d'euros, et Jean-Philippe Seta à quatre ans de prison avec sursis. Près de 200 millions d'euros devront aussi être versés aux milliers de victimes, selon le premier calcul d'un avocat à l'issue de l'audience (1).

La firme Servier et Jean-Philippe Seta ont, par contre, été relaxés pour les faits d'« obtention indue d'autorisation » et d'« escroquerie » au détriment des assureurs maladie obligatoires et complémentaires pour le remboursement de Mediator° (1).

L'Agence française du médicament a été condamnée pour « homicides et blessures involontaires par négligence et imprudence », pour n'avoir retiré Mediator° du marché qu'en 2009, alors qu'elle disposait des informations pour le faire dès septembre 1998, selon le tribunal. L'Agence a été condamnée à une amende de 303 000 euros (1).

Neuf personnes étaient mises en cause pour « atteinte à la probité » : cinq ont été relaxées, quatre condamnées (1,2). Pour avoir conseillé la firme Servier moins de trois ans après une mission de service public de contrôle des firmes pharmaceutiques, Jean-Michel Alexandre, ancien directeur de l'évaluation des médicaments à l'Agence, et Jacques Massol, ancien membre de la Haute autorité de santé, ont été condamnés à 18 mois de prison avec sursis et 30 000 euros d'amende ; Christian Bazantay, ancien responsable de la firme Servier, a été condamné pour « complicité » du délit de Jean-Michel Alexandre. Bernard Rouveix, ancien expert auprès de l'Agence, a été condamné à un an de prison avec sursis et 30 000 euros d'amende, pour « prise illégale d'intérêts » (1).

Claude Griscelli, ancien directeur général de l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), jugé pour « trafic d'influence », et l'ex-sénatrice Marie-Thérèse Hermange, jugée pour « complicité de trafic d'influence », ont été relaxés (1).

L'Agence française du médicament a indiqué qu'elle ne ferait pas appel de sa condamnation (1). Le parquet, lui, a fait appel des relaxes de la firme Servier et de Jean-Philippe Seta, qui, de leur côté, ont fait appel de leurs condamnations. Les assureurs maladie obligatoires, des assureurs complémentaires et des victimes ont aussi fait appel du jugement. Celles-ci souhaitent obtenir « des condamnations plus sévères sur le plan pénal et des indemnisations sur le plan civil à la hauteur du préjudice subi », selon un avocat de victimes (3).

D'après cet avocat, le procès en appel commencerait dans un an et demi ou deux ans, au plus tôt (3).

©Prescrire

Sources

 

1- Notes d'un rédacteur de Prescrire au tribunal judiciaire de Paris, 29 mars 2021.

2- "La firme Servier et l'Agence française du médicament devant le tribunal" Rev Prescrire 2019 ; 39 (431) : 700-701.

3- "Mediator° : les caisses d'assurance maladie font également appel de la relaxe de Servier pour escroquerie" Dépêche APMNews du 8 avril 2021 : 2 pages.