Bisphénol A et dioxyde de titane : l'Agence européenne du médicament (EMA) n'est pas d'accord pour retirer ces substances des produits de santé alors que leur nocivité dans l'alimentation est reconnue.
Bisphénol A : un perturbateur endocrinien
Le bisphénol A est surtout utilisé dans la fabrication de polycarbonates et de résines époxydes, qui entrent dans la composition de nombreux récipients et emballages alimentaires. L'alimentation est considérée comme la principale source d'exposition au bisphénol A de la population générale (1).
En 2023, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a conclu que « le bisphénol A dans les aliments présente des risques pour la santé » (2,3). Ses scientifiques ont analysé plus de 800 études publiées depuis 2013 et retenu des effets potentiellement nocifs de ce perturbateur endocrinien sur le système immunitaire, le métabolisme, la reproduction et le développement (1,2). L'EFSA a en conséquence divisé par 20 000 la dose journalière de bisphénol A dite tolérable, c'est-à-dire la « quantité qui peut être ingérée quotidiennement tout au long de la vie sans présenter de risque appréciable pour la santé » (2).
L'EMA a critiqué le niveau de preuves des données analysées par l'EFSA sur le bisphénol A, substance utilisée à différentes étapes de la fabrication ou du conditionnement de médicaments et de dispositifs médicaux (4). Il reviendra à la Commission européenne et aux États membres de l'Union de prendre d'éventuelles mesures de restriction (2).
Dioxyde de titane : des nanoparticules génotoxiques
Le dioxyde de titane est un colorant et un opacifiant génotoxique, cancérogène et mutagène in vitro et chez l'Animal (5). À la suite d'un avis de l'EFSA, son utilisation dans l'alimentation est interdite en France depuis 2020, et en Europe depuis 2022 (6,7).
En 2021, l'EMA a mis en avant un risque de pénurie de médicaments en cas d'interdiction générale du dioxyde de titane (7). Elle a estimé, à partir de déclarations des firmes, qu'il faudrait « 10 ans voire davantage » pour permettre aux firmes de s'adapter (8).
Avant de se prononcer sur une éventuelle interdiction du dioxyde de titane dans les produits de santé, la Commission européenne attend les nouveaux arguments de l'EMA, pour 2024 (7).
Intérêt des patients versus intérêt des firmes
Des substances toxiques restreintes voire bannies dans l'alimentation et qui restent autorisées dans les produits de santé ? L'EMA doit œuvrer efficacement à convaincre les firmes pharmaceutiques de trouver vite de meilleures alternatives.