Bilan 2017 du conditionnement : la qualité en progression mais encore beaucoup de dangers

Résumé

En 2017, Prescrire a analysé le conditionnement de 318 spécialités pharmaceutiques. Le contraste est frappant entre les progrès constatés, le laisser-faire des agences du médicament et les lacunes de nombreuses firmes pharmaceutiques à mettre en œuvre ces améliorations, surtout : étiquetages plus sûrs, dispositifs doseurs plus précis, bouchons-sécurité, notices utiles à la protection des patients.

Les progrès sont surtout dus à l'évolution des exigences réglementaires et à la publication par les autorités de santé de recommandations favorables à la sécurité des patients. Mais les firmes pharmaceutiques et les agences appliquent trop peu ces mesures qui doivent beaucoup aux demandes de la société civile.

En pratique, cela se traduit encore, en 2018, par de nombreux flacons-vrac de médicaments au lieu de plaquettes unitaires sécurisées, plus pratiques et plus sûres ; des flacons sans bouchon-sécurité ; des dénominations communes internationales trop peu visibles sur les boîtes ou étiquetages ; etc. Ces dangers justifient une grande vigilance de la part des soignants afin de les repérer, d'en avertir les patients, et de les notifier aux autorités de santé.

Les bilans annuels du conditionnement des médicaments de Prescrire ont pour objectifs : d'informer les soignants des principaux dangers des conditionnements présents sur le marché en prévention d'erreurs médicamenteuses ; et de promouvoir des critères de qualité en termes de conditionnements favorables à la protection des patients. Ils s'adressent aussi aux firmes pharmaceutiques et aux agences du médicament dans le but d'améliorer la sécurité face aux nombreux dangers (1).

Une évolution positive, mais encore beaucoup de dangers

En 37 ans, Prescrire a analysé environ 7 000 conditionnements. Au fil du temps, divers progrès ont été observés : meilleure prise en compte des risques d'erreurs médicamenteuses auxquels les conditionnements dangereux exposent ; davantage d'étiquetages valorisant la dénomination commune internationale (DCI), le vrai nom des médicaments ; amélioration de la qualité des dispositifs doseurs ; utilisation plus fréquente des bouchons-sécurité. Fin 2017, l'Agence française du médicament (ANSM) a recommandé que les plaquettes unitaires soient le standard de qualité pour la protection et l'identification des comprimés et des gélules ; et par ailleurs elle a demandé début 2018 l'arrêt des gammes ombrelles (a)(2à4). Mais ces progrès sont lents. Quantité de conditionnements restent inadaptés aux diverses situations de soins, et au lieu de garantir la sécurité des patients, ils les exposent à des dangers.

Voici divers exemples de progrès ou de dangers parmi les 318 conditionnements examinés en 2017 par Prescrire.

Des progrès : dénomination lisible, dosages valorisés, plaquettes unitaires prédécoupées

Chaque année, davantage de conditionnements affichent très lisiblement la DCI. Par exemple en 2017 : Cresemba° (isavuconazole), Ibrance° (palbociclib), Zavicefta° (ceftazidime + avibactam). Ainsi, les substances contenues dans ces spécialités sont facilement identifiables.

Les plaquettes unitaires prédécoupées de comprimés ou de gélules sont le meilleur moyen technique pour garantir, jusqu'à l'administration de chaque unité de prise, l'identification complète du médicament, avec son dosage, son numéro de lot, et sa date de péremption, sans contraindre les soignants à des actes de reconditionnement et de réétiquetage.

Beaucoup moins disponibles en soins ambulatoires qu'en milieu hospitalier, de telles plaquettes sont cependant en augmentation, par exemple : Dépamide° (valpromide), Dépakote° (divalproate de sodium), Tagrisso° (osimertinib), Mysildecard° (sildénafil), Kalydeco° (ivacaftor). Les plaquettes unitaires prédécoupées de la première spécialité générique commercialisée en France, par la firme Mylan, de l'association emtricitabine + ténofovir disoproxil constituent un progrès par rapport au flacon-vrac du princeps Truvada°. Prescrire a décerné une Palme du conditionnement 2017 à cette présentation en plaquettes unitaires prédécoupées.

Mentions de dénomination des substances et de leur dosage peu lisibles

L'absence ou la minimisation de la DCI sur les conditionnements est un signe du manque d'attention de la part des firmes et des autorités de santé à l'importance de l'identification des substances présentes dans les spécialités. Cela reste une pratique relativement fréquente : dans Bactérix°, la DCI nifuroxazide est absente de la plaquette ; dans Nausicalm° sirop, diménhydrinate ne figure pas sur la face principale de la boîte. La DCI est minimisée sur diverses spécialités : Ponstyl° (acide méfénamique) ; Zimino° (lévosimendan), gamme Vogalène°/Vogalib° (métopimazine), Drill rhume° (chlorphénamine + paracétamol) ; Biocalyptol° (pholcodine). Sur les plaquettes de Delprim° (triméthoprime) et le flacon du spray buccal de Lysopaïne° (ambroxol), les DCI sont particulièrement petites et peu contrastées.

La sécurité est aussi compromise lorsque les étiquetages du sirop Ferrostrane° (férédétate de sodium) impliquent le calcul de la quantité en mg de fer élément par ml à partir de mentions peu informatives « 0,68 % » ou « 0,68 g pour 100 ml ».

Une pratique d'étiquetage courante avec les associations à doses fixes, comme Skudexum° (tramadol + dexkétoprofène), est le regroupement sur le conditionnement des mentions de DCI sous la forme « tramadol/dexkétoprofène » et des mentions de dosage sous la forme « 75 mg/25 mg ». Pour plus de clarté, chaque dosage devrait être indiqué immédiatement à la suite de la substance tel que : « tramadol 75 mg » et « dexkétoprofène 25 mg ».

En matière d'étiquetage, l'ANSM a un rôle majeur au niveau national pour faire appliquer par les firmes le plus haut niveau de sécurité découlant de la réglementation et des recommandations européennes. Après de nombreuses défaillances constatées sur les conditionnements ces dernières décennies, l'ANSM a enfin proposé, fin 2017, des recommandations pour valoriser sur les étiquetages des mentions utiles à la sécurité des patients, notamment la DCI (a)(2,3).

Flacons-vrac de comprimés ou gélules : un conditionnement inadapté

Les flacons-vrac présentent les médicaments comme une masse dans laquelle on pioche ou que l'on verse dans le creux de la main. Quand le médicament est sorti du flacon, n'étant plus emballé, il est exposé à une détérioration. Et le seul moyen de l'identifier est alors son aspect ou, le cas échéant, les inscriptions sur la gélule ou le comprimé. La manipulation de médicaments une fois extraits du flacon-vrac est parfois dangereuse, par exemple quand il s'agit de médicaments cytotoxiques. Pour une dispensation nominative en collectivités, les flacons-vrac imposent aux soignants des actes de reconditionnement et de réétiquetage qui sont autant de sources d'erreurs.

En 2017, des flacons-vrac ont encore été constatés sur de nouvelles spécialités : Cosimprel° (bisoprolol + périndopril), Epclusa° (sofosbuvir + velpatasvir), Résitune° (acide acétylsalicylique), Velphoro° (oxyhydroxyde sucroferrique), Wakix° (pitolisant). D'autres perdurent : Ascofer° (ascorbate ferreux), Ferriprox° (défériprone), Kuvan° (saproptérine), Dépakine chrono° et autres (acide valproïque), Mestinon° 60 mg (pyridostigmine), Orfadin° (nitisinone), Truvada° (emtricitabine + ténofovir disoproxil), Zytiga° 250 mg (abiratérone). Au lieu des flacons-vrac de poudre orale Fumafer° (fumarate ferreux) et Kayexalate° (polystyrène sulfonate de sodium), des sachets unidoses contenant la quantité nécessaire par prise constitueraient des moyens plus précis et plus simples à manier, adaptés aux posologies préconisées.

Plaquettes non unitaires : problème d'identification de chaque unité

Les plaquettes non unitaires sont un défaut courant. Elles affichent des mentions disposées souvent de manière oblique, façon "papier peint", sans prendre en compte les alvéoles sous-jacentes. Elles sont fréquentes en soins ambulatoires et s'accompagnent souvent d'autres défauts telle que la minimisation des DCI, qui rendent l'étiquetage de ces plaquettes globalement très médiocre : Drill rhume° (chlorphénamineparacétamol), Nausicalm° gélules (diménhydrinate), Vogalib°/Vogalène Lyoc° (métopimazine), Delprim° (triméthoprime), etc.

Les plaquettes non unitaires empêchent la préparation à l'avance de doses unitaires de médicaments protégés par leur emballage et clairement identifiables. Les soignants ou les aidants des patients à domicile peuvent être conduits à découper les plaquettes non unitaires, avec un risque élevé de tronquer ou de faire disparaître les mentions de DCI et de dosage. Pour une dispensation nominative en collectivités, ce type de conditionnement oblige à des actes de reconditionnement et de réétiquetage qui exposent à des erreurs.

Plaquettes portefeuille : pratiques en ville, inadaptées à l'hôpital

Certaines boîtes de médicaments renferment des portefeuilles cartonnés constitués de trois volets. Le volet gauche a généralement une fonction informative (DCI, dosage, nom commercial, etc.). Parfois, il comporte une fente pour y glisser la notice. Les deux autres volets contiennent les comprimés ou gélules. Ces médicaments sont emballés dans des plaquettes disposées entre les deux faces cartonnées du volet. Les alvéoles des plaquettes dépassent de trous prévus dans le volet afin de pouvoir extraire le médicament.

Ces portefeuilles permettent une disposition des unités de prise adaptée à des rythmes d'administration complexes (hebdomadaires, progressifs, etc.). Celui d'Emend° (aprépitant) conçu pour le début de traitement présente au niveau du volet central la gélule à 125 mg avec la mention « jour 1 » et, au niveau du volet droit, les deux gélules à 80 mg avec les mentions « jour 2 » et « jour 3 ». Une telle solution paraît claire et sécurisante pour l'utilisation par les patients en soins ambulatoires.

Des présentations unitaires d'Emend° sont disponibles pour les collectivités, mais plusieurs médicaments sont uniquement commercialisés en portefeuille, ce qui les rend inadaptés pour une dispensation nominative dans les collectivités, par exemple : Aubagio° (tériflunomide) ; Jinarc° (tolvaptan) ; Zepatier° (elbasvir + grazoprévir) (b).

Formes buvables, dispositifs doseurs : les recommandations de l'ANSM encore peu appliquées

En 2016, l'ANSM a publié des recommandations destinées aux firmes pour améliorer la qualité des dispositifs doseurs. Notre examen de conditionnements en 2017 montre que ces recommandations ont été encore très peu suivies par les firmes (1).

Beaucoup de défauts ont encore été constatés. Par exemple : absence de dispositif doseur avec les sirops Codédrill° (codéine), Drill maux de gorge° (alfa-amylase) ou Hexapneumine adultes° (biclotymol + chlorphénamine + pholcodine). Et aussi beaucoup trop de cuillères en plastique ou de gobelets, dispositifs doseurs imprécis, avec les flacons de Fumafer° (fumarate ferreux), de Kayexalate° (polystyrène sulfonate de sodium), et la plupart des flacons contenant de la pholcodine, de l'oxomémazine, de la carbocistéine, etc.

Des formes complexes à préparer, en particulier des médicaments buvables pour les enfants

Les médicaments prêts à l'emploi, ou dont la forme et le conditionnement réduisent le plus possible le nombre d'étapes de préparation et d'administration, sont à privilégier. En 2017, les stylos auto-injecteurs Metoject° ou Nordimet° constituent pour le méthotrexate une option plus sûre que les flacons multidoses, et plus pratique que les seringues préremplies.

Au niveau européen, on observe une tendance au développement de formes pédiatriques buvables dont la préparation et le conditionnement sont d'un grand niveau de complexité. Il s'agit de poudres impliquant plusieurs étapes de préparation : mesure d'un volume d'eau précis, préparation d'une suspension à partir de l'eau et de la poudre, mesure du volume de suspension à administrer (sans confondre les mg prescrits avec les ml à mesurer), puis élimination du surplus de suspension non utilisée. Par exemple, les présentations pédiatriques d'Emend° (aprépitant) (non commercialisé en France au 26 février 2018), d'Isentress° (raltégravir), de Norvir° (ritonavir) et de Kuvan° (saproptérine). Ces modalités de préparation complexe sont source d'erreurs de doses et nécessitent souvent l'intervention d'un soignant pour préparer le médicament.

Les enfants peu protégés des risques d'intoxications

Mettre un bouchon-sécurité sur le flacon d'un médicament multidoses est une protection élémentaire retrouvée avec certaines spécialités : Likozam° (clobazam), Zyrtec° (cétirizine), Aerius° (desloratadine), Clarityne° (loratadine). Et cela concerne aussi les bouchons avec pipette doseuse ou "compte-gouttes" intégrés : Abilify° (aripiprazole). Mais cette sécurité est encore souvent absente.

Des dangers inacceptables

En 2017, de nouvelles spécialités ont été autorisées en flacon sans sécurité : Activox rhume pélargonium° (extrait de racine de pélargonium) ; Cosimprel° (bisoprolol + périndopril). Des bouchons-sécurité sont trop peu résistants comme celui du flacon de Résitune° (acide salicylique), selon nos tests.

Beaucoup d'anciennes spécialités présentent encore ce danger. Le flacon multidoses du sirop de Ferrostrane° (férédétate de sodium) aura été commercialisé durant cinq décennies sans bouchon-sécurité. Un bouchon-sécurité est annoncé par la firme pour 2018.

Parmi les sirops de pholcodine (Biocalyptol°, Dimétane°, Hexapneumine°, etc.), un seul flacon a été équipé en 2017 d'un bouchon-sécurité par la firme qui le commercialise (Poléry enfants°). Les boîtes et les flacons de la poudre multidoses d'aspect chocolaté de Fumafer° (fumarate ferreux) et ceux de la poudre vanillée de Kayexalate° (polystyrène sulfonate de sodium) ne comportent aucune sécurité, etc. Et tous ces médicaments sont dangereux en cas de surdose chez les enfants.

Protéger aussi des médicaments sous plaquettes

Les plaquettes de comprimés ou gélules sont un moyen de retarder une ingestion massive. Lorsque l'ingestion de quelques comprimés d'un médicament suffit à tuer un enfant, comme c'est le cas de la colchicine, l'absence d'élément de sécurité supplémentaire est imprudente. Le choix d'un film anti-effraction pour recouvrir les plaquettes de certains opioïdes est dans cette situation exemplaire (Méthadone AP-HP°), quitte à fournir dans la boîte un outil pour aider à l'extraction des comprimés. Des crans de blocage-déblocage au niveau des boîtes contenant les plaquettes sont une option supplémentaire.

Plantes : conditionnements insuffisamment informatifs

En 2017, nous avons examiné le conditionnement de quatre médicaments à base de plantes. Les extraits de racine de pélargonium (Activox rhume pélargonium°, Belivair rhume pélargonium°) exposent à des troubles digestifs et des réactions d'hypersensibilité, et des atteintes hépatiques ont été rapportées. L'extrait sec de feuilles de lierre grimpant (Herbion expectorant lierre°) expose à des troubles digestifs et des réactions allergiques. Leur conditionnement, comme celui de Nirva° à base d'extrait sec de passiflore, sont insuffisamment informatifs. Ils sont parfois dangereux : prédominance des noms commerciaux, minimisation des dénominations, plaquettes non unitaires peu informatives, dispositifs doseurs imprécis, absence de bouchon-sécurité, notices peu pédagogiques ou insuffisantes.

Par ailleurs, nous avons constaté, sur le site de l'ANSM et le site de la base de données publique sur les médicaments, l'absence de plusieurs résumés des caractéristiques (RCP) et de notices de médicaments à base de plantes (par exemple, pour Activox rhume pélargonium° et Nirva°).

Conditionnement et tératogénicité : actualité importante en 2017

Les risques graves auxquels les médicaments pris pendant la grossesse exposent l'enfant à naître sont reconnus souvent après de longues années voire après des dizaines d'années d'utilisation.

Un pictogramme sur une majorité de boîtes

Pour rendre plus visibles ces dangers, en 2017, l'Association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (Apesac) a obtenu de l'ANSM l'apposition d'un pictogramme sur les boîtes des médicaments à base d'acide valproïque et de ses dérivés, mesure qui s'est ensuite généralisée en France à tout médicament tératogène ou fœtotoxique (5).

Depuis notre analyse publiée fin 2017, notre surveillance de l'application de cette mesure nous mène à des constats d'incohérences. Par exemple, avec les anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS), Prescrire a souligné les risques existant pendant toute la durée de la grossesse (6). Sur une boîte de Spifen° (ibuprofène) examinée en décembre 2017, la mention associée au pictogramme interdit (rond barré) concerne bien toute la grossesse, ce qui est cohérent avec les risques rapportés dès le 1er trimestre au chapitre grossesse du RCP. Mais sur une boîte d'Ibuprofène Sandoz° examinée en novembre 2017, le pictogramme interdit est associé à la mention « ne pas utiliser chez la femme enceinte à compter du 6e mois de la grossesse » car il s'appuie seulement sur le chapitre contre-indication du RCP.

Le pictogramme diffusé depuis 2017 sur une majorité de spécialités n'est pas une réponse à lui seul au besoin d'information des patientes, mais il leur adresse de manière durable un signal général fort de prudence vis-à-vis des médicaments ainsi désignés pendant la grossesse. Et il appartient aux soignants de rappeler que l'absence de pictogramme ne signifie pas pour autant que le médicament peut être utilisé sans risque pendant la grossesse.

Notices et effets indésirables : moins d'informations que dans les RCP

Il est souhaitable que les patients soient informés de manière précise par les notices fournies avec le médicament visant à renforcer la sécurité des patients et le bon usage du médicament. La notice doit être conforme au RCP à jour, qui est le document conçu pour l'information des soignants. Mais nous constatons fréquemment un niveau d'information abaissé des notices par rapport au RCP en ce qui concerne les précautions, mises en garde et effets indésirables, ce qui nuit à la sécurité des patients.

Fin 2017, la Cour d'appel d'Orléans a confirmé la responsabilité de la firme Sanofi Aventis dans la survenue d'effets malformatifs chez une enfant exposée in utero à l'acide valproïque-Dépakine° (7). Selon la firme : « la notice patient [du 19 juillet 2001], rédigée sous le strict contrôle de l'Autorité de santé, reflétait également le risque tératogène, en conformité avec les termes du RCP ». Cette notice stipulait : « en cas de grossesse ou de désir de grossesse, prévenez votre médecin. En effet, votre traitement devra éventuellement être adapté et une surveillance particulière devra être mise en route. Au moment de la naissance, une surveillance attentive du nouveau-né sera nécessaire ». Mais la Cour d'appel, après avoir rappelé que l'information du RCP, conçue pour les soignants et non disponible dans les conditionnements, ne pouvait se substituer à celle de la notice en matière d'information des patientes, a jugé que la notice de Dépakine° de 2001 « n'offr[ait] pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre dès lors qu'elle ne contient pas, parmi les effets indésirables possibles (…) le risque tératogène (…) d'une particulière gravité s'il se réalise (…) » (7).

Examinée en 2017 par Prescrire, la notice de Delprim° (triméthoprime) rappelle seulement d'éviter une utilisation au cours du 1er trimestre de grossesse, et de consulter un médecin en cas de découverte d'une grossesse pendant le traitement (8). Le RCP correspondant mentionne un risque de tératogénicité et détaille les risques graves associés à la prise avant et en début de grossesse.

C'est aussi par une justification réglementaire trop formaliste que la firme Gilead Sciences explique l'absence de mention d'effets indésirables dans la notice d'Epclusa° (sofosbuvir + velpatasvir) (9,10).

En somme, notifier les conditionnements dangereux

En 2017, beaucoup de firmes ont continué de commercialiser ou de maintenir sur le marché des conditionnements dangereux, acceptés par des autorités de santé peu exigeantes quant à la qualité des conditionnements. Un conditionnement doit permettre l'utilisation d'un médicament avec un maximum de sécurité : posologie correspondant à celle prescrite, information sur les effets indésirables, les interactions médicamenteuses, etc. Les soignants ont un rôle important à jouer en choisissant parmi divers médicaments semblables celui dont le conditionnement est de meilleure qualité, en expliquant certaines modalités pratiques complexes aux patients et en notifiant auprès de l'Agence du médicament les dangers repérés avec certains conditionnements le cas échéant (lire l'encadré "Conditionnement des médicaments en Europe : quelles forces de progrès ?").

Synthèse élaborée collectivement par la Rédaction

sans aucun conflit d'intérêts

©Prescrire

Notes

a- Nous reviendrons dans un numéro ultérieur sur les recommandations de l'Agence française du médicament (ANSM) relatives aux noms commerciaux et aux étiquetages.

b- Les plaquettes encartées dans les conditionnements de type portefeuille peuvent ne comporter aucune mention (par exemple, Emend°-aprépitant), quand les mentions apparaissent uniquement sur les volets cartonnés dans lesquels elles sont encartées. S'il s'avère nécessaire d'extraire la plaquette du portefeuille pour en découper une alvéole en préparation d'un traitement, l'alvéole n'est plus identifiable, sauf réétiquetage.

Extraits de la veille documentaire Prescrire

1- Prescrire Rédaction "Bilan 2016 du conditionnement : davantage de marketing que de santé publique" Rev Prescrire 2017 ; 37 (401) : 214-220.

2- ANSM "Commissions d'évaluation initiale et de suivi du rapport entre les bénéfices et les risques des produits de santé du 16 novembre 2017. Retour sur séance" 20 novembre 2017 : 1 page.

3- ANSM "Recommandations à l'attention des demandeurs et titulaires d'autorisations de mise sur le marché et d'enregistrements relatives à l'étiquetage des conditionnements des médicaments sous forme orale solide (hors homéopathie)" octobre 2017 : 28 pages.

4- ANSM "Nom des médicaments - Recommandation à l'attention des demandeurs et titulaires d'autorisations de mise sur le marché et d'enregistrements" janvier 2018 : 9 pages.

5- Prescrire Rédaction "Un pictogramme sur les boîtes de médicaments tératogènes ou fœtotoxiques" Rev Prescrire 2017 ; 37 (410) : 903-904.

6- Prescrire Rédaction "Encore des bébés à naître exposés à des AINS" Rev Prescrire 2016 ; 36 (397) : 827-828.

7- Cour d'appel d'Orléans - Chambre civile "Décision n° 16/00141" 20 novembre 2017 : 19 pages.

8- Commission européenne "Notice-Delprim°" 25 mars 2016 : 2 pages.

9- Gilead Sciences "Courriel à Prescrire" 26 décembre 2017 : 1 page.

10- Commission européenne "Notice-Epclusa" 30 octobre 2017 : 8 pages.