En mai 2018, dans le cadre de la mise à jour de documents d'informations entre autorités nationales, l'Agence européenne du médicament (EMA) a mis en consultation un formulaire intitulé "Déclaration de non-respect des bonnes pratiques de fabrication" (1). Ce document prévoit que, en cas de découverte de non-respect sérieux des bonnes pratiques de fabrication d'un médicament lors d'une inspection sur un site de production pharmaceutique, les autorités sanitaires peuvent décider de « minimiser ou accepter le risque », si cela permet d'éviter des ruptures de stocks en médicaments, et si notamment le producteur fournit une analyse de la balance bénéfices-risques du médicament concerné par le problème de qualité (a)(1). À l'occasion de cette consultation, Prescrire a appelé l'EMA et les firmes à se ressaisir (2).
Les bonnes pratiques de fabrication : garantes de la qualité pharmaceutique
En vue de l'octroi d'une autorisation de mise sur le marché (AMM), les firmes doivent documenter la balance bénéfices-risques et la qualité pharmaceutique du médicament (3). Et le respect des bonnes pratiques de fabrication garantit la qualité pharmaceutique (b).
Alors que certaines firmes se sont fait rappeler à l'ordre à plusieurs reprises par l'Agence étatsunienne (FDA) pour non-respect des bonnes pratiques de fabrication, l'EMA envoie un signal inquiétant en actant que de telles insuffisances seraient somme toute acceptables selon les circonstances (2,4).
Les ruptures de stocks ne sont pas une fatalité
Dans sa réponse à l'EMA, Prescrire a rappelé la problématique grandissante des ruptures de stocks de médicaments et de vaccins, tant en France que dans les autres pays européens (2). Ces ruptures ne sont pas une fatalité, mais sont la conséquence, entre autres, de la réorganisation par les firmes de leur production. En effet, pour limiter les coûts et maximiser les profits, les firmes délocalisent souvent la production des matières premières pharmaceutiques dans une usine d'un pays où les salaires et les coûts sont bas. Elles sont ainsi confrontées à des soucis d'approvisionnement quand elles dépendent d'une unique source mondiale qui a des difficultés de production (2).
Responsabiliser les firmes
Pour Prescrire, les ruptures de stocks représentent une menace sanitaire qui ne justifie pas d'accepter la circulation de médicaments non conformes aux bonnes pratiques de fabrication. Le rôle des autorités sanitaires est de rappeler aux firmes qu'elles n'ont pas seulement des droits. Elles ont aussi des devoirs, à savoir permettre un approvisionnement suffisant en médicaments utiles pour les soins, pour lesquels une AMM a été accordée et dont la qualité pharmaceutique doit être garantie (2).
Notes
a- Selon ces propositions, il suffit qu'une firme fournisse un "plan de minimisation des risques" aux autorités sanitaires des pays concernés, et que les autorités sanitaires ne s'opposent pas à cette commercialisation, pour qu'un médicament dont la qualité pharmaceutique n'est pas aux normes puisse être commercialisé (réf. 1).
b- En pratique, il s'agit d'être sûr que les médicaments contiennent bien la ou les substance(s) annoncée(s), à leur dosage annoncé, avec les excipients prévus et seulement ceux-là, fabriqués selon un procédé validé et avec les contrôles de qualité nécessaires à chaque étape.