Résumé
S'assurer que les conditions requises pour maintenir le double aveugle sont respectées.
Essai en double aveugle ?
Une forme emplâtre à 5 % de lidocaïne (Versatis°) est commercialisée en France pour le « traitement symptomatique des douleurs neuropathiques post-zostériennes ». Un essai a comparé cette forme emplâtre à 5 % de lidocaïne versus pommade à 0,75 % d'acide acétylsalicylique. L'équipe Prescrire vous propose de lire des extraits du compte rendu publié de cet essai, puis de répondre à une question. Suivent une proposition de réponse et des commentaires de la Rédaction.
Extraits de la publication d'un compte rendu d'essai
« Acide acétylsalicylique topique versus lidocaïne pour les névralgies post-zostériennes : résultats d'un essai clinique comparatif en double aveugle
(…) Le but de cet essai était de comparer l'efficacité de l'acide acétylsalicylique et celle de la lidocaïne. (…)
L'essai a inclus 40 patients (…) admis consécutivement dans notre unité de la douleur (…). Il a été demandé aux patients de recouvrir 3 fois par jour durant 4 semaines les zones cutanées douloureuses avec la pommade A ou B et de revenir en consultation externe toutes les semaines. L'intensité de la douleur a été mesurée à l'aide de l'échelle visuelle analogique de Bond. (…) Traitement A : 750 mg d'acide acétylsalicylique + 4 % de méthylcellulose hydrogénée comme excipient dans 100 g de pommade lavable. Traitement B : 1 g de lidocaïne dans 20 g de pommade. (…)
L'amélioration moyenne de la douleur après application locale du traitement A (aspirine) a été de 72,2 % ± 19,9 % DS [Déviation standard], alors qu'après le traitement B (lidocaïne) elle a été de 72,8 % ± 25,3 % DS. (…). » (1).
bibliographie
1- Tajti J et coll. "Topical acetylsalicylic acid versus lidocaine for postherpetic neuralgia : result of a double-blind comparative clinical trial" Neurobiology 1999 ; 7 (2) : 103-108.
Avez-vous l'assurance que les conditions du double aveugle sont respectées ?
Proposition de réponse et commentaires de la Rédaction
La lecture du compte rendu de l'essai ne permet pas d'avoir la certitude que les deux médicaments ont une apparence identique. Il semble que les tubes de pommade de lidocaïne pèsent 20 g et ceux d'aspirine 100 g. D'autre part, étiqueter les médicaments au seul moyen des lettres A et B n'est pas correct car il suffit de deviner, pour un seul patient, le médicament qu'il reçoit pour lever définitivement le double aveugle.
Le maintien du double aveugle est important pour ne pas introduire de biais dus à la connaissance des médicaments reçus. Pour cela, les médicaments comparés doivent être strictement identiques : poids, aspect, odeur, goût, etc. Cela conduit parfois à utiliser des placebos dits "impurs" c'est-à-dire des substances avec une couleur, un goût, etc. proches du médicament actif.
Si l'on devine quel est le médicament reçu pour un ou quelques patients, cela ne doit pas conduire à en déduire quel est le médicament reçu par les autres patients, ce qui risque d'arriver si les médicaments sont trop simplement étiquetés. Pour éviter ce risque, il est habituel d'attribuer un numéro de code pour le médicament de chaque patient. La table de correspondance "numéro de code / médicament reçu" doit être inconnue de tous ceux qui participent à l'essai et n'est à transmettre qu'à ceux qui effectuent les analyses. Une copie de cette liste de correspondance est souvent gardée sous enveloppe scellée (par exemple, par le pharmacien de l'établissement si l'essai se déroule à l'hôpital). Elle permet, si nécessaire, la levée de l'aveugle pour un patient, notamment s'il se produit un événement indésirable "grave".
bibliographie
Pour les gourmands retrouvez de plus larges extraits de ces documents, d'autres questions, et les propositions de réponse et commentaires de la Rédaction à ces questions sur : formations.prescrire.org rubrique "Lectures critiques" (Exercice n° 7 : Omission trompeuse).