Le médicament est au cœur du métier de pharmacien. En ville, on attend des pharmacies qu'elles assurent une dispensation des médicaments en apportant aux patients des conseils de qualité et de la sécurité. En échange, il est cohérent que la dispensation de médicaments contribue à la rémunération des pharmacies. En France, en 2019, cette rémunération a évolué, en amoindrissant la place accordée à la marge sur le prix du médicament, au bénéfice d'honoraires de dispensation calculés en fonction de la tranche d'âge du patient ou de la complexité du traitement (lire aussi "Rémunération des pharmacies d'officine françaises : du médicament aux soins"). Et depuis 2013, de nouvelles missions ont progressivement été confiées aux pharmaciens afin d'accompagner les patients : suivis pharmaceutiques dans certaines situations cliniques, bilans de médication pour les personnes âgées de plus de 65 ans et polymédicamentées, etc. Ces évolutions vont dans le bon sens en renforçant le rôle de soignant des équipes de pharmacies d'officine.
Effectuer une dispensation de qualité, aider les patients à mieux gérer leurs médicaments, à reconnaître les effets indésirables, à éviter les erreurs, entreprendre une démarche de déprescription en coordination avec le médecin traitant, voilà des services justifiant une rémunération. S'engager davantage, en apportant de la sécurité au soin médicamenteux et en partageant les compétences avec les autres professionnels de santé pour des décisions éclairées, est une démarche utile aux patients. Augmenter la part des honoraires liés à l'analyse pharmaceutique des prescriptions et aux conseils associés lors de la dispensation est une reconnaissance du travail des équipes des pharmacies.
Ces évolutions sont l'occasion pour certaines équipes officinales de s'extraire du modèle commercial qui met en avant les produits de santé comme des biens de consommation courante. Malgré tout, des pharmacies hésitent encore ou peinent à s'impliquer dans les nouvelles missions, par manque de moyens, de formation, par humilité, mais aussi du fait de la faible attractivité de leur rétribution.
Les autorités semblent prendre pleinement conscience du rôle des équipes officinales, pas comme un simple levier économique, mais comme l'une des forces nécessaires au service des patients dans la cohésion des soins. Ces équipes ont été largement sollicitées lors de l'épidémie de covid-19 pour dispenser de nombreux médicaments et dispositifs médicaux dans des conditions exceptionnelles temporaires, préparer des gels hydro-alcooliques, gérer la répartition de masques aux soignants libéraux, contribuer à des téléconsultations, répondre aux inquiétudes de la population. Il reste aux autorités et aux gestionnaires à mettre en œuvre des moyens à la hauteur des enjeux, pour aider les équipes officinales à s'investir davantage dans ces nouvelles missions dans l'intérêt de tous.