Dès 1978, le Dr Henri Pradal, pharmaco-toxicologue, décrivait dans son dictionnaire la nature réelle de Mediator°. La journaliste spécialisée en santé Catherine Sokolsky s'en souvient. Et analyse le chemin parcouru par l'information critique sur le médicament en France depuis quarante ans. Des propos recueillis par Prescrire en septembre 2019.
Le guide Pradal a ouvert la voie à une information critique du grand public sur le médicament. D'autres l'ont-ils suivi ?
Les gens sont friands d'informations concrètes sur le médicament, les concernant individuellement : est-ce efficace, est-ce dangereux, quelles interactions, etc. ? Pourtant, en termes d'information indépendante, le secteur médical a longtemps été peu développé, alors qu'il existait déjà des organismes de défense et d'information du consommateur dans tous les domaines.
Les Français se sont jetés sur le guide Pradal, vendu à des centaines de milliers d'exemplaires. La revue "l'Impatient", créée par le journaliste Pierre Clermont et à laquelle j'ai participé dès le début en 1977, avait pour directeur de publication Henri Pradal. Son sous-titre, « Mensuel de défense et d'information des consommateurs de soins médicaux », était explicite. Nous informions entre autres sur le médicament. Ainsi, nous avons relayé des critiques sur la publicité et sur la mauvaise information concernant les effets indésirables de Pondéral°, que par ailleurs, dans son "Dictionnaire" de 1978, Henri Pradal classait comme certainement toxique et franchement cher.
En 2006, "Que choisir santé" est né avec le dessein de s'inscrire dans une même veine d'information pour le grand public, avec la rigueur de Prescrire. Selon des sondages auprès des lecteurs, la rubrique la plus lue était l'information sur le médicament, et cette tendance s'est renforcée lorsqu'a éclaté l'affaire du Mediator°.
En 2019, selon moi, il n'existe pas d'équivalent pour le grand public du "Dictionnaire" Pradal, offrant, pour chaque médicament, une information fiable scientifiquement et bien écrite, dans un style agréable, voire humoristique, même si le "Guide des 4 000 médicaments utiles, inutiles ou dangereux" des Prs Debré et Even a, plus récemment, témoigné d'un esprit critique similaire.