La France passe au niveau international pour être un pays
où le prix des médicaments est contrôlé,
voire fixé par les pouvoirs publics. En réalité,
le prix des nouveaux médicaments a rejoint la moyenne européenne.
Les dépenses pharmaceutiques françaises continuent
de croître nettement plus vite que la moyenne des dépenses
de santé, et la France est un des pays qui consomment le
plus de médicaments en proportion de leur produit intérieur
brut.
Le "contrôle" du prix de vente des médicaments
en France ne permet pas de maîtriser les dépenses pharmaceutiques,
parce que les firmes orientent la prescription et la consommation
des Français vers les médicaments les plus récents,
et donc les plus chers.
La législation européenne en vigueur ne permet pas
d'utiliser les autorisations de mise sur le marché comme
un outil de régulation du nombre de médicaments mis
sur le marché. Mais rien n'oblige à rembourser tous
les médicaments. Les responsables des comptes sanitaires
et sociaux, qu'ils soient au gouvernement ou dans les organismes
de protection sociale (de base ou complémentaire), ont une
solution simple pour réguler de manière pertinente
la dépense pharmaceutique publique : financer et/ou exiger
des essais cliniques comparatifs pertinents.
Pour une régulation médicalisée
du système de santé
Les besoins de santé sont extensibles mais les ressources
sont limitées. Une régulation est nécessaire
pour que les ressources collectives soient allouées de manière
optimale aux besoins de santé jugés collectivement
légitimes. La participation des professionnels de santé
à la définition des objectifs médicaux de la
régulation du système de santé est un enjeu
central de l'avenir de ces professions.
Rev Prescrire 1995 ; 15 (149) : 234-235.
Années 1990 : une libéralisation
internationale croissante défavorable au contrôle des
prix des médicaments
Pendant les années 1990, le prix des nouveaux médicaments
commercialisés en France a rejoint la moyenne européenne,
sans que les volumes de consommation, traditionnellement élevés
en France, ne baissent pour autant. Les pouvoirs publics français
ont perdu une part de leur pouvoir de négociation avec les
firmes, en conséquence d'une baisse du poids des firmes françaises
sur le marché mondial, et de la mise en place des règles
libérales choisies dans le cadre la construction du marché
européen. Les firmes transnationales font jouer la concurrence
entre pays. Elles privilégient les pays qui, comme les États-Unis
d'Amérique, leur offrent le plus de liberté (des prix
notamment).
Rev Prescrire 2001 ; 21 ( 222) : 782-786.
Les différentes composantes de la facture
pharmaceutique française
La dépense pharmaceutique remboursable est à différencier
d'une part de la dépense non remboursable (médicaments
à prix libre), et d'autre part de la consommation pharmaceutique
hospitalière, à prix libres et "négociés".
Rev Prescrire 2001 ; 21 ( 222) : 782-786.
Prix proportionnels à l'innovation :
principe raisonnable, maigres résultats
Le Comité économique des produits de santé
(CEPS) reconnaît officiellement l'impossibilité de
négocier avec les firmes le prix des médicaments que
la Commission de transparence a considéré comme "innovants".
Le contrôle des prix ne permet pas le contrôle des dépenses : fortement promus et prescrits, les médicaments récents
et chers représentent une part essentielle de la progression
des dépenses pharmaceutiques en France. Tout le système
de négociation des prix repose en France sur la Commission
de transparence, qui établit les ASMR. Mais cette Commission
doit juger souvent de l'utilité relative des nouveaux médicaments
sans avoir les résultats d'essais comparatifs pertinents.
En France et ailleurs, les pouvoirs publics ne pourront raisonnablement
récompenser les vrais progrès thérapeutiques
qu'en exigeant ou en finançant eux-mêmes des essais
comparatifs pertinents.
Rev Prescrire 2001 ; 21 (223) : 859-863.
Remises de fin d'année : un système
discret mais peu efficace de maîtrise des dépenses
Les conventions firmes/Comité économique des produits
de santé (CEPS) prévoient des engagements sur l'évolution
des chiffres d'affaires, dont le dépassement entraîne
le paiement de remises de fin d'année. Sont exclus du chiffre
d'affaires soumis au calcul de remise les médicaments génériques,
et les médicaments à "amélioration du
service médical rendu" (ASMR) importante pendant les
premières années de leur commercialisation. La Cour
des comptes regrette que le CEPS n'applique pas ses règles
avec toute la rigueur requise, mais reconnaît la faiblesse
du rapport de force dans certains cas. La possibilité (instaurée
en 2003) pour les firmes de fixer le prix de leurs médicaments
considérés comme "innovants", sans attendre
la décision du CEPS, ne fait qu'entériner l'incapacité
de ce dernier à fixer en France des prix inférieurs
aux prix européens.
Rev Prescrire 2002 ; 22 (234) : 855-859.
Le cas exemplaire de Tahor°
L'exemple des hypocholestérolémiants du groupe des
statines est intéressant pour illustrer la complexité
des responsabilités dans l'ampleur de la facture pharmaceutique
en France. Dans le cas de l'atorvastatine (Tahor°), se conjuguent
déficit en formation initiale et continue, une promotion
musclée et un prix de vente étonnamment élevé.
Rev Prescrire 2002 ; 22 (234) : 855-859.
© La revue Prescrire 1er décembre
2004
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