Pharmacien soignant

Un pharmacien : « Bonjour docteur, nous pouvons désormais suivre les patients prenant un AVK [antivitamine K], au cours d'entretiens rémunérés. Bien sûr en complémentarité avec vous pour que ce soit efficace. Qu'attendez-vous de nous ? »

Un médecin : « Je ne sais pas trop… Qu'est-ce que vous pouvez nous apporter ? »

Ni condescendance, ni mépris dans ce dialogue, mais une méconnaissance du service que peut rendre un pharmacien au patient. Une méconnaissance répandue, tant la formation initiale et l'exercice professionnel sont compartimentés, tant les rencontres interprofessionnelles et les occasions de se parler vraiment restent rares.

La situation est parfois moins propice au dialogue.

Un autre médecin : « Des entretiens payés pour les pharmaciens, alors que nous faisons ça en permanence »…

Un autre pharmacien : « Pour ma part le contrôle de la bonne utilisation (…) au grand dam de certains médecins aux alentours (…) un petit peu d'éducation thérapeutique avec courrier informatif au médecin (…) serais-je en dehors de mes prérogatives ? »

Depuis sa création, Prescrire soutient, et vit chaque jour dans son équipe, la richesse du travail pluriprofessionnel, des échanges constructifs, des compétences complémentaires. Et déplore le gâchis de la sous-utilisation de professionnels du médicament longuement formés que sont les pharmaciens. Combien vaut la détection d'une interaction médicamenteuse dangereuse ? L'interception d'une prescription inadaptée ? Un conseil pour bien utiliser un médicament ? Beaucoup pour le patient et sa sécurité… et aussi pour le prescripteur concerné. Apparemment pas assez pour ceux qui campent sur un mode de rémunération dépendant des quantités vendues.

En Suisse, des pharmaciens ont montré l'intérêt, pour les patients et pour l'organisation des soins, d'un service de consultations à l'officine pour des situations de soins courantes (lire aussi "Suisse : consultations pour situations courantes par les pharmaciens d'officine"). Ils sont payés pour ce service rendu. Pour cela, ils ont pris le taureau par les cornes : formation spécifique validée des pharmaciens volontaires, tri des situations de soins et des sources d'information, avis médical en recours, évaluation de leur action. Et ils ont justifié, preuves en mains, qu'ils peuvent répondre efficacement à un besoin non satisfait.

Certes, tout n'est pas transposable. Mais le fait que des pharmaciens peuvent être des professionnels de soins à la manœuvre, si ! Ils sont les plus à même de montrer et démontrer l'intérêt d'un pharmacien soignant de premier recours. Sinon qui le fera ?

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