Alcool et alimentation trop sucrée ou trop grasse sont en France des causes majeures d'années de vie perdues et de dépenses de santé. Le diagnostic est fait depuis longtemps, les rapports s'accumulent, l'annonce d'une priorité est réitérée. Que manque-t-il pour améliorer vraiment la situation ?
Besoin de courage politique
Dans le domaine des addictions, dont l'alcool, la Fédération française d'addictologie a bien résumé la situation en septembre 2017 : « Les mesures efficaces de prévention sont connues et documentées, mais elles font mal : c'est là leur défaut, mais c'est aussi à cette aune que l'on juge du courage et de la sincérité des engagements politiques » (1). Car il faut s'opposer aux lobbies industriels et commerciaux qui œuvrent pour que la politique de prévention se limite à une éducation pour la santé (1).
Dans le domaine de l'alimentation, le rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) de juillet 2016 sur le plan national nutrition santé (PNNS 3) et le plan obésité 2010-2013 a conclu notamment que : « À vouloir avancer par consensus, le PNNS n'a jamais été en capacité d'adopter des mesures dont l'efficacité est pourtant reconnue. Il a alors occulté, au nom du consensus et des intérêts des parties prenantes, des aspects importants de la problématique nutritionnelle. En particulier, il a insuffisamment pris en compte les actions possibles sur l'offre, tant le pouvoir des lobbies de l'agroalimentaire est puissant (…). Pour protéger les enfants il conviendrait d'interdire toute forme de publicité à leur intention comme l'a fait le Québec » (a)(2).
2018 : vers des mesures courageuses et sincères ?
La Stratégie nationale de santé présentée par le gouvernement français fin 2017 pour 2018-2022 est une liste d'objectifs dont la pertinence est sans doute forte dans la plupart des cas (3). Pour ce qui concerne l'alcool et l'alimentation, la Stratégie nationale de santé dresse un beau diagnostic de la situation. Toute la question est donc de savoir quels seront le « courage et la sincérité des engagements politiques » pour que cette stratégie se concrétise en mesures qui améliorent vraiment la situation sanitaire en France, et tout particulièrement celle des personnes les plus défavorisées sur les plans sanitaires et sociaux.
Souhaitons que le gouvernement français soit réellement déterminé à défendre la santé publique face aux lobbies viticoles, agroalimentaires et autres !
Notes
a- Depuis le 1er janvier 2018, la publicité est interdite en France pendant (et 15 minutes avant et après) les émissions de télévision (et sites internet correspondants) destinées prioritairement aux enfants âgés de moins de douze ans, mais seulement sur le service public… (réf. 4). Au Québec, l'interdiction de la publicité visant les enfants âgés de moins de 13 ans est totale, pour tous les médias et tous les supports (réf. 5).