Avant les années 2000, quand un médicament dit de fond d'une polyarthrite rhumatoïde était envisagé, on disposait de médicaments obtenus par synthèse chimique. Leur mode d'action était vague, sur l'inflammation et l'immunité, mais plusieurs sont manifestement efficaces. Puis sont arrivées des protéines produites par biotechniques, appelées "biothérapies" (anti-TNF alpha, anti-interleukines, etc). Les médicaments plus anciens ont alors été qualifiés d'"antirhumatismaux conventionnels". Avec l'arrivée du tofacitinib (Xeljanz°) et du baricitinib (Olumiant°) apparaissent les "antirhumatismaux de synthèse ciblés". Ils sont obtenus par synthèse chimique et non par biotechniques.
On sent les intentions de marketing : évoquer la modernité, le progrès, la frappe de précision sans dégât collatéral, la technologie de pointe ; reléguer les médicaments précédents à une époque dépassée. Ainsi, "conventionnel" renvoie à une image de tradition dépassée. "Biothérapie" évoque des techniques utilisées depuis déjà des décennies, pour la production d'insuline, par exemple. "Ciblé" suggère un mécanisme d'action très précis, idéalisé, qui estompe les interactions et le rééquilibrage constants entre les mécanismes physiologiques et physiopathologiques. Et estompe les effets collatéraux…
Mais quand on cherche à objectiver le progrès thérapeutique, ni les modes de production ni les mécanismes d'action idéalisés ne permettent de prédire l'intérêt d'un médicament. De fait, les résultats de l'évaluation clinique du baricitinib (n° 413, p. 171-172) et du tofacitinib (lire aussi "tofacitinib (Xeljanz°) et polyarthrite rhumatoïde") ne montrent pas de progrès pour les patients.
Pas de quoi reprendre cette terminologie pompeuse. Avis aux sociétés savantes !
