Les malformations et les effets néfastes à long terme liés à l'acide valproïque chez les enfants exposés in utero ont été connus progressivement et tardivement par les professionnels de santé : les malformations dans les années 1980 et les effets neurocomportementaux dans les années 2000. Ces risques ont été pris en compte avec lenteur, et les femmes concernées ont souvent été mal informées. L'affaire Dépakine°, en 2015, a porté ces faits aux regards de tous.
Pour les femmes épileptiques qui pourraient devenir enceintes, les autres antiépileptiques sont-ils plus sûrs pour l'enfant à naître ? Existe-t-il des antiépileptiques sans danger pour l'enfant à naître et qui permettent de prévenir les crises d'épilepsie chez la mère sans l'exposer elle-même à de grands dangers ?
Que répondre à une femme ou à son conjoint qui légitimement demandent : « Avec cet antiépileptique, mon enfant sera-t-il autiste ? Aura-t-il des troubles du comportement ? Est-on vraiment obligé de prendre ce traitement ? Si oui, alors je veux en savoir plus sur les effets à long terme, pour pouvoir décider en connaissance de cause d'avoir ou non un enfant. »
Face à tant de questions, toutes fondées, le fatalisme n'est plus permis. Il est impératif d'exploiter sans tarder toutes les données disponibles et de les rendre publiques.
Les incertitudes restent nombreuses et pas seulement avec les antiépileptiques. Les mêmes questions se posent notamment avec tous les médicaments psychotropes : les antidépresseurs, les neuroleptiques, les médicaments à effets atropiniques, etc. ; et aussi avec les médicaments perturbateurs endocriniens. Les patientes ont besoin, pour elles et pour leurs enfants, que les épidémiologistes fassent progresser la connaissance des effets à long terme de tous ces médicaments qui exposent les enfants à des risques encore trop mal cernés.
On ne trouve le plus souvent que ce que l'on cherche. Il y a urgence à financer ces études épidémiologiques et à réaliser régulièrement des campagnes d'information pour une utilisation réfléchie des médicaments, qui prenne en compte, entre autres, le cas particulier des femmes enceintes et des enfants à naître.
Pour les professionnels de santé, il y a urgence à prendre le temps de peser soigneusement les avantages, les inconvénients et les risques de toutes les options à envisager, et de les discuter avec les patientes. Car certains effets néfastes médicamenteux, quand ils atteignent les enfants exposés in utero, changent radicalement et durablement la vie des familles touchées.