Tous crédules ?

Tout ce qui est écrit dans Prescrire est, forcément, vrai. Forcément vrai puisqu'écrit en toute indépendance, selon une méthode d'élaboration collective avec de nombreux contrôles de qualité en interne, et prise en compte de l'avis de nombreux relecteurs, experts du sujet abordé ou praticiens de terrain, indépendants de la Rédaction.

Ainsi, il est vrai que le protryptophane a un intérêt majeur dans la sénilité aiguë. Ce fait a été révélé par Prescrire dès avril 1983 grâce à son "envoyé spécial" au congrès de Kwajalumpur. Et il est vrai aussi qu'une seule prise d'un comprimé de psychotropine (Panaceum°), un psychotrope polyvalent extrait d'une plante du Haut Tibet (Panaceus miraculosus Linn.) assure la guérison des affections psychologiques et psychiatriques. Les abonnés à Prescrire ont été informés de cette avancée thérapeutique majeure en avril 1984.

Comme quoi, certains mois d'avril ont été propices à des "révélations" de progrès thérapeutiques mirobolants. À moins que ces mois d'avril n'aient été propices à des canulars espiègles !

Celui d'avril 1984 eut des répercussions inattendues : prescriptions de Panaceum° par centaines ; pharmaciens et grossistes à la recherche de ce médicament miracle ; standard téléphonique de Prescrire surchauffé ; dépêche explicative à l'Agence France Presse ; Rédacteur en chef de l'époque contraint d'expliquer le canular au journal télévisé.

Il fallut alors se rendre à l'évidence : certains lecteurs, abonnés ou non, lisent vite et parfois trop vite ; tandis que d'autres font peut-être trop confiance à Prescrire, et probablement à la chose écrite en général, ou à celle qui apparaît sur écran. Et nos correspondants relecteurs, dont nous attendons les critiques avisées lors de l'élaboration des textes de Prescrire, ne lisent-ils pas aussi trop superficiellement ou avec trop de confiance la "littérature internationale" ou nos projets rédactionnels ? Et quel rédacteur de Prescrire peut se targuer de ne jamais avoir eu un tel comportement vis-à-vis des sources d'information qu'il utilise ?

À l'évidence, nous avons tous besoin de piqûres de rappel régulières pour bousculer notre crédulité et pour aiguiser notre pensée critique. Prescrire prévoit une piqûre de rappel annuelle sous forme d'un canular publié en avril : un plus ou moins gros "poisson" conçu pour nous aider à réfléchir à notre perception de l'information, sourire aux lèvres.

Ce numéro 438 d'avril 2020 ne déroge pas à la règle. Si le cœur vous en dit : la pêche est ouverte !

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