Le marché pour les médicaments et les vaccins du covid-19 est gigantesque, concernant des milliards de personnes avec potentiellement des dizaines de milliards de dollars à la clé. Business as usual ? Pas tout à fait.
Médicaments : surtout des (dés)illusions
La pandémie de covid-19 a donné lieu en 2020 à beaucoup d'essais cliniques de nombreux médicaments connus, quasi-seule stratégie de recherche pharmaceutique possible à court terme (1). Le plus connu d'entre eux, l'hydroxychloroquine (Plaquénil°), a fait l'objet d'une commande massive aux États-Unis d'Amérique (29 millions de comprimés), mais l'absence de preuve solide de son efficacité a rapidement réduit son utilisation et son marché (2,3). Le remdésivir (Veklury°) a donné lieu à un contrat de commandes par la Commission européenne d'un montant de un milliard d'euros, à une date où la firme connaissait déjà le peu d'intérêt de cet antiviral au vu des résultats de l'essai clinique dit Solidarity (4). L'Europe a fait un pari, mais la firme a raflé la mise.
Vaccins : des nouveaux venus et beaucoup d'argent public
En 2020, les trois premiers producteurs de vaccins mondiaux étaient GlaxoSmithKline, Merck et Sanofi (5). Début 2021, leurs candidats vaccins sont encore loin d'une commercialisation, quand trois vaccins sont déjà autorisés dans l'Union européenne et plusieurs autres en passe de l'être (6).
La mise sur le marché des premiers vaccins dits à ARN messager a dépassé les pronostics en termes de rapidité et d'efficacité. Ce nouveau type de vaccins s'appuie sur des recherches menées dans des universités et des petites firmes de biotechniques, notamment aux États-Unis et en Allemagne (7). Dans ces deux pays, des centaines de millions d'euros de fonds publics ont été versés aux firmes en 2020, et les précommandes de centaines de millions de doses en provenance du monde entier ont largement solvabilisé le marché (8,9).
Des firmes pharmaceutiques ont tiré profit de leur association avec des institutions publiques, telles AstraZeneca avec l'université d'Oxford ou Moderna avec le National Institutes of Health étatsunien. Pfizer, 4e producteur mondial de vaccins, a tiré son épingle du jeu en s'alliant à BioNTech, jeune entreprise allemande la plus avancée dans la recherche sur les vaccins à ARNm.
Réinventer le modèle de recherche
La pandémie de covid-19 a été l'occasion d'une forte accélération de la mise au point des vaccins, grâce à l'implication de nombreux acteurs publics et privés, et à l'apport d'une quantité considérable de fonds publics. Les acteurs habituels de ce domaine, notamment de grandes firmes pharmaceutiques, n'y ont pas joué de rôle central, même si quelques-uns ont su nouer des alliances gagnantes. De quoi accélérer aussi la réflexion sur le modèle de recherche en matière de thérapeutique et le rôle optimal des différents acteurs.