En France, alors que l'épidémie de bronchiolite était déjà préoccupante fin 2022, le Ministre de la santé a annoncé des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant pour le printemps 2023 (1). Ses participants pourront s'appuyer sur les nombreux états des lieux déjà consacrés au délabrement de l'organisation des soins aux enfants et adolescents en France.
Causes multiples, connues depuis des années
Rapports de la pédiatre Danièle Sommelet en 2006, de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) mi-2021, de la Cour des comptes fin 2021, du Haut conseil de la santé publique (HCSP) en 2022 : autant d'exemples de travaux officiels décrivant les difficultés de la pédiatrie, avec des constats concordants (2à5).
L'un de ces constats est celui d'une pénurie de pédiatres, de chirurgiens pédiatriques, de médecins généralistes et de santé scolaire, de pédopsychiatres, d'infirmières puéricultrices, particulièrement en protection maternelle et infantile (PMI). S'y ajoutent, en raison des insuffisances des programmes de formation ou par manque de formateurs, un amoindrissement progressif des compétences sur la santé des enfants des médecins généralistes, pédopsychiatres, psychologues, infirmières non spécialisées ; un manque de coordination entre les professionnels concernés ; un manque de lisibilité du parcours de soins pour les parents (2à5).
De plus, divers ministères, instances nationales et acteurs locaux sont impliqués, mais leur coordination fait défaut, ce qui peut nuire à l'efficacité de mesures telles que la réduction des fortes inégalités sociales pesant sur la santé des enfants (2à4).
Possibles pertes de chance
Cette désorganisation peut avoir d'autres conséquences délétères sur la santé des enfants : orientation vers des services d'urgences déjà engorgés, faute d'avis spécialisé disponible ; hospitalisations en réalité non justifiées par la situation clinique ; dégradation de la qualité des soins, avec d'éventuels retards diagnostiques voire des pertes de chance (5).
La mortalité néonatale (entre 0 et 27 jours de vie) a augmenté en France métropolitaine entre 2010 et 2019 (4à6). Est-ce lié, au moins en partie, à la dégradation des soins aux enfants ?
Pas une affaire de saison
Publiquement dénoncée fin 2022 par des milliers de soignants, la "crise de la pédiatrie" s'est manifestée de façon encore plus aiguë à l'hôpital durant l'épidémie de bronchiolite (7). Mais elle ne se limite pas à l'hiver, qui stimule temporairement l'attention des médias et des politiques (1,7). Un comité interministériel à l'enfance lancé fin 2022 a annoncé plusieurs « chantiers prioritaires » parmi lesquels, en plus de l'organisation des Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant, la réduction des inégalités de santé (8). Ce sont aussi des réponses de fond qui sont attendues.