Dans son rapport public sur l'évaluation du nivolumab (Opdivo°) en traitement adjuvant de certains cancers de l'œsophage, l'Agence européenne du médicament (EMA) n'a pas précisé les données comparatives de mortalité du principal essai clinique transmis par la firme. Elle a rapporté la mortalité pour l'ensemble des patients, mais sans détailler la mortalité dans chaque groupe, nivolumab ou placebo (lire aussi "nivolumab (Opdivo°) en traitement adjuvant de certains cancers de l'œsophage"). L'argument avancé par l'EMA est que ces résultats n'étaient pas disponibles au moment de son évaluation, au prétexte que les données étaient alors "préliminaires" ("immatures" en anglais), c'est-à-dire incomplètes, par manque de recul.
Parce qu'elles prennent en compte un nombre de morts inférieur à ce qui est prévu par le protocole pour l'analyse dite finale, les données préliminaires de mortalité obtenues lors des premières analyses sont fragiles, d'où des incertitudes. Les résultats obtenus grâce à un suivi plus long sont plus solides. Malgré ces limites, pourquoi l'EMA n'exige-t-elle pas, lors de son évaluation d'un antitumoral, de connaître toutes les données de mortalité disponibles ? Elle aurait alors l'occasion de les rendre publiques, tout en mettant en avant les incertitudes qui les entourent.
La mortalité n'est pas le seul critère pertinent dans les essais cliniques en cancérologie. Pour autant, il s'agit tout de même d'un critère fondamental, en premier lieu pour les patients. Et connaître les données de mortalité issues d'essais comparatifs et les limites de ces données participe à une décision éclairée de soins. Quand une firme ne remet pas spontanément des données importantes, pour quelque motif que ce soit, l'EMA devrait exiger, obtenir, puis publier ces données avec son avis, au service des patients.
